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lundi 11 août 2025

Balade sur les traces de la cité médiévale de Saint-Léonard-de-Noblat, un site patrimonial remarquable du Limousin

 MakirieGrâce à son patrimoine remarquablement bien conservé, la ville de Saint-Léonard de Noblat cumule les distinctions : « Sites et cités remarquables », « Plus beaux détours de France », « Ville et Métiers d’art »… Sa cité médiévale est quant à elle classée « Site patrimonial remarquable du Limousin » et vaut le détour.

La collégiale romane Saint-Léonard de Saint-Léonard de Noblat est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1998 au titre des chemins de Saint-Jacques de Compostelle. A la fois église reliquaire, église paroissiale et collégiale, l’édifice paraît gigantesque par rapport à la taille modeste de la cité, montrant l’importance du culte autour de l’ermite Léonard. A ce jour, quelques 1 200 lieux recensés dans 15 pays d’Europe mais aussi au Canada sont sous son patronage, dont plus de 200 en Italie, Allemagne et Grande-Bretagne.

L’église Saint-Léonard à Lipnica Murowana dans les environs de Cracovie en Pologne © Darek Bednarek – stock.adobe.com

« Le saint qui nous libère de nos prisons »

La légende qui entoure le filleul de Clovis 1er, Léonard de Noblat, confesseur des prisonniers,  s’est répandue après qu’il eut sauvé la reine d’un l’enfantement difficile grâce à ses prières. Pour le remercier, le roi lui donna une partie de la forêt de Pauvain qu’il pourrait parcourir avec son âne en une journée. L’ermite s’y est retiré dans la 1ère moitié du VIe siècle et il y a construit une chapelle dédiée à Notre Dame et Saint Rémi. La légende rapporte qu’il fera d’autres miracles comme faire jaillir l’eau. Des prisonniers libérés grâce à son intercession et des familles vont ensuite le rejoindre.

Ainsi, avant l’an mil, « Nobiliacum » est fondée en surplomb de la vallée de la Vienne. Au fil des siècles, la cité va se développer grâce aux pèlerins venant remercier Léonard. De nos jours, les pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle sont encore nombreux à faire halte dans la cité qui porte désormais le nom de Saint-Léonard de Noblat.

Construite à partir du XIe siècle, la collégiale Saint-Léonard attire de nombreux pèlerins sur le chemin de Compostelle © Lotharingia – stock.adobe.com

Construite au XIe et XIIe siècles et remaniée jusqu’au XIXe siècle, la collégiale Saint-Léonard a été conçue pour la déambulation des pèlerins qui commencent à affluer à partir du XIe siècle, touchés par ses récits de miracles. L’édifice est un pur joyau de l’art roman avec des dimensions impressionnantes, notamment son clocher-porche haut de 52 m à plan carré puis octogonal, le dernier de ce type dans la région.

Avec ses 52 m de haut et son plan carré devenant octogonal, le clocher porche de la collégiale Saint-Léonard est le dernier de ce type dans la région © capude1957 – stock.adobe.com

« Le monument emblématique de la ville a été construit sur un emplacement précis, au milieu d’un itinéraire nord/sud pour que les gens la voient de loin » indique Martine Tandeau de Marsac, présidente de Connaissance et Sauvegarde de Saint-Léonard, « le culte de Léonard était entrain de se développer en Europe. La ville va vivre ainsi à l’heure du pèlerinage et la renommée du culte va participer au développement commercial. On hébergeait les pèlerins dans des auberges et dans les caves voûtées des maisons qui étaient ouvertes sur l’extérieur et hautes de 2,50 m à 4 m.» Ils étaient des milliers à faire le pèlerinage. Outre son clocher, l’édifice est aussi remarquable par ses fenêtres à gable, sa rotonde qui sert de baptistère, son portail limousin, sa nef voûtée, sa tour lanterne et son vaste chœur éclairé par sept chapelles rayonnantes. Les reliques du saint sont enfermées dans les châsses au-dessus du maître autel.

Si Léonard libère les prisonniers, il délivre aussi les femmes en couche. Plus généralement, il est sollicité pour toutes les délivrances. La tradition veut que si on touche le verrou, on aura un enfant dans l’année. Au-dessus d’une pierre tombale en serpentine, des chaînes et des entraves de prisonniers symbolisent ce fameux verrou. « La vénération est importante pour les femmes atteintes de stérilité » remarque l’historienne, « pour elles, c’est une façon de lâcher prise après avoir essayé, en vain, plein de choses. C’est vraiment une démarche spirituelle. Des ex-voto y sont déposés depuis environ 15 ans pour remercier Léonard. Il est enfin le saint qui libère de toutes les prisons, de tout ce qui peut enfermer la personne. » Une autopsie des reliques fut même réalisée lors des ostensions de 2023.

Le verrou de Saint-Léonard © Inventaire général du patrimoine culturel, Région Nouvelle-Aquitaine

Sur les traces des remparts et des charreirons

Au Moyen-Age, on sait que la ville était close par des remparts, le tracé correspondant aux actuels boulevards, avec 6 grandes portes et 3 plus petite. On peut en apercevoir quelques traces en l’occurrence, la base d’une tour (Boulevard Carnot), des mâchicoulis fichés dans un mur de maison (Boulevard Barbusse) et des montants de portes (Rue Victor Hugo).

Des machicoulis sur la façade de cette maison du Boulevard Barbusse, vestiges des remparts de la cité médiévale de Saint-Léonard de Noblat © Corinne Mérigaud

« L’édification a été achevée fin XIIe, les murs faisaient de plus de 10 m entourés d’un fossé sec » indique-t-elle, « une tour était équipée d’un pont levis et d’une herse. Les murs vont se dégrader avec la Guerre de Cent ans et les guerres de religion, il restera 4 portes qui seront restaurées. » Irréparables à la fin du XVIIe, les remparts serviront de carrières de pierre.

En se baladant, on peut emprunter les « charreirons », d’anciens passages qui contournaient les îlots habités pour pouvoir circuler plus facilement dans la ville close. « La ville est restée dans ses remparts avec les mêmes rues qu’aux XIIIe et XIVe siècles et il n’y a pas d’équivalent sur le département » assure-t-elle, « un projet d’Haussmann a été lancé au XIXe mais arrêté à temps sinon, il n’y aurait plus de bourg médiéval. » Une magnifique galerie Renaissance avec des arcades où l’on pouvait discuter et faire ses achats à l’abri située à l’emplacement de la terrasse du café « Les deux tours » a été détruite vers 1850.

Le bourg médiéval de Saint-Léonard a bien failli disparaitre au XIXe siècle © Corinne Mérigaud

Dans ce dédale de rues, il y avait aussi des venelles, des ruelles très étroites, qui faisaient office de coupe feu et de déversoir pour les eaux usées. On en devine une obstruée entre deux magasins, Place de la République, et une autre au niveau de la maison du physicien Louis-Joseph Gay-Lussac.

Des maisons médiévales conservées

Face au portail gothique de la collégiale, une maison du XIIIe siècle abritait les Consuls. « Ils administraient la ville jusqu’à la Révolution suite au privilège accordé par les Rois de France, ils seront remplacés par un conseil municipal » précise-t-elle, « la maison a été remaniée au XIXe. On distingue la grande arcade brisée sur la façade sud autrefois ouverte précise-t-elle, sur les deux étages, il y a de belles fenêtres doubles et des baies géminées reliées par une colonnette. » La pâtisserie Martin est la plus caractéristique de la période médiévale.

La maison des consuls et la pâtisserie Martin, deux édifices emblématiques de la période médiévale de Saint-Léonard de Noblat © Corinne Mérigaud

Autre bâtiment imposant, le foyer rural qui héberge aujourd’hui le musée Gay-Lussac dans l’ancien couvent des Filles de Notre Dame. Ces religieuses instruisaient alors les jeunes filles. L’ordre sera dissout à la Révolution et le couvent occupé par… les gendarmes jusqu’en 1970. Les sœurs reviendront pour construire un second couvent (l’actuel collège) qui ouvrira ses portes en octobre 1898 et fermera en 1904, une loi interdisant aux religieuses d’enseigner. Un détour par le vieil hôpital (rue Georges Perrin) est intéressant pour découvrir ce bâtiment resté dans son jus et deux portails d’origine datés du XIIIe.

L’ancien couvent des Filles de Notre Dame a longtemps été occupé par… les gendarmes © Corinne Mérigaud

Un parcours en préparation

La municipalité travaille sur un projet de signalétique avec des panneaux A3 incluant photos et textes qui présenteront 12 sites patrimoniaux de la cité médiévale : Collégiale, Maison des Consuls, Maison de l’ermitage, charreirons, maisons médiévales, Champ de Foire, le vieil hôpital, la tour ronde et la tour carrée, l’ancien couvent des Filles Notre Dame, le Grand Saint-Léonard, remparts et origines de la ville.

Chaque panneau sera apposé devant un site et un QR code renverra à un site Internet pour en savoir plus. Sur chacun sera indiqué le site à découvrir avant et après, pour se balader sans tenir un plan. Les panneaux devraient être installés en fin d’année.

Pour aller plus loin :

– Maquette de la cité médiévale réalisée par Annick Bru à voir au tiers-lieu « L’escalier » près de la collégiale.

– A lire « L’abécédaire de Saint-Léonard de Noblat » publié en 2025 par Martine Tandeau de Marsac et Bernard Bernaben et « Histoires d’une ville » par Connaissance et Sauvegarde de Saint-Léonard.

Corinne Mérigaud
Corinne Mérigaud
Journaliste Actus Limousin

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