Plus de cent ans après sa première séance, le « Lido », plus vieux cinéma de Limoges, nous dévoile un nouveau visage et n’est pas près de partir à la retraite ! Rénovation intégrale, nouvelle salle, nouvelle configuration… ce lieu mythique pour les amateurs du 7ème art continue de se réinventer. Retour sur l’histoire d’un cinéma historique qui regarde résolument vers l’avenir !
Telle une star hollywoodienne des années 80, « le Lido » s’est offert un lifting en cette année 2025. Après plus de 10 mois de travaux, le mythique cinéma de Limoges dévoile notamment une nouvelle salle, qui porte à quatre le total des salles obscures du Lido. Ce chantier, prévu avant le Covid, a aussi donné l’occasion au cinéma de revoir l’organisation de ses salles, tout en retrouvant son hall historique qui n’était plus utilisé depuis 50 ans.
Même avec cette nouvelle formule, l’esprit du cinéma reste le même qu’en 1965 : mettre en lumière le cinéma d’Art et d’Essai. « Quand on a eu l’idée de construire cette quatrième salle sur l’emplacement de l’ancienne boîte de nuit, le Vip’s, on est parti du constat que de plus en plus de films sortent. De notre côté, on avait la volonté de proposer des films plus confidentiels auxquels le public n’a pas forcément accès. De là, l’idée d’une nouvelle salle a fait son chemin », confie Bruno Penin, le directeur du groupe des cinémas Grand Écran de Limoges.
L’autre nouveauté, c’est aussi le réaménagement des salles. En plus de la création d’un point d’accès pour les Personnes à Mobilité Réduite pour les salles 2, 3 et 4, le Lido a aussi revu à la baisse son nombre de sièges pour proposer plus de confort aux spectateurs. Par exemple, la salle 1, la plus grande du Lido, est passée de 340 à 317 places. De même pour la très étriquée salle 3 qui possède aujourd’hui 29 places, contre 60 à sa plus grande capacité.

« On voulait casser cette image historique du cinéma Art et Essai, où les gens ne viennent que pour voir des films sans forcément chercher du confort. Dans certaines salles, en fonction de là où vous étiez assis, vous ne pouviez pas profiter pleinement de votre film. Maintenant, peu importe la place et la salle, le confort est le même ! », se réjouit Bruno Pénin.
Une histoire du cinéma « Made In Limoges »
Mais impossible de parler du Lido sans évoquer son histoire : plus ancien cinéma de la ville encore en activité, le bâtiment qui abrite aujourd’hui Le Lido est plus vieux de 10 ans que l’actuelle gare des Bénédictins ! Sa première séance remonte au 21 février 1919, à 20h30 précisément. Au programme de cette première au « Ciné Moka » (le premier nom du Lido), 5 films muets, époque oblige : Du Caire au Pyramide, Eclipse-Journal, Malombra, Le Ballon Rouge, et Bobby et les Pacifistes.

Dès le départ, le Lido se démarque des autres, en devenant le cinéma « select » de Limoges. Pour faire la différence, la partie musicale des diffusions est soignée et interprétée par des orchestres locaux ou plus renommés, comme en novembre 1923, où c’est Robert Couzinou, baryton de l’opéra de Paris puis de Monte-Carlo, qui y interpréta les célèbres couplets du toreador de Carmen pour la diffusion des Arènes sanglantes (Fred Niblo, 1922).
Le « Ciné-Moka », deviendra « Ciné Royal-Moka » en 1927 puis « Capitole » en 1928, et va s’adapter à son époque : en février 1930, il devient le premier cinéma de Limoges à équiper ses salles d’un poste fixe sonorisé et le cinéma parlant commence à s’imposer dans la Cité de la porcelaine. Premier film de cette nouvelle ère, Anna Karénine, un film muet spécialement sonorisé pour l’occasion et, la même année, les Limougeauds découvriront Louise Farenda interpréter les couplets de la comédie musicale No No Nanette de Clarence G. Badger dans un film 100% sonore ! Depuis, le son du cinéma n’a cessé d’évoluer jusqu’à aujourd’hui, où la sonorisation des salles du Lido a entièrement été revue pendant les travaux.
Des grands noms du jazz et un certain… Johnny Halliday !
Cependant, il est difficile d’évoquer l’histoire du Lido sans parler de son côté spectacle. Avant d’adopter son organisation actuelle, le bâtiment possédait une salle d’une capacité de plus de 1000 personnes car à cette époque les actuelles salles 1 et 2 ne formaient qu’une. La salle 1 et son plafond étaient les balcons et la 2, aujourd’hui au sous-sol du Lido, formait le bas de la pièce.

Si cette spécificité permettait d’accueillir les orchestres qui mettaient en musique les films muets de l’époque, la grande salle du 3, Avenue de la gare (aujourd’hui Avenue du général de Gaulle) a aussi servi de salle de concerts. Parmi les plus incontournables, ceux du « Hot Club de Limoges », référence en matière de jazz dans les années 50 à 70, y organisera les représentations de nombreux grands noms de l’époque : Willie Smith, Mezz Mezzrow, Bill Coleman, Milt Buckner, Buddy Tate ou encore Joe Turner… A cette époque, le cinéma se nomme « Le Paris » ; quant à la salle en sous-sol, on l’appelle… « Le Lido » !
« Le Paris » profite aussi de la démolition du cirque-théâtre et de la construction de l’opéra pour voir, le temps des travaux, plusieurs chanteurs de variété se produire dans ses locaux. Et notamment un certain… Johnny Hallyday qui enflammera à plusieurs reprises la salle de cinéma et de spectacle !

« On veut aider les gens à apprécier encore plus le cinéma »
« Le Nouveauté », « Le Palace », « Le Star », bien des cinémas limougeauds n’ont pas résisté au temps et aux crises, mais le Lido, lui, a su traverser les époques. En 1965, il deviendra un cinéma « Art et Essai » par la volonté du directeur de l’époque, Serge Fridemann, une figure du cinéma limougeaud. Il confiait alors à nos confrères de « Limousin Magazine » son envie de « se renouveler, échapper à trente ans de routine, de navets de premières parties, d’entractes moroses, d’éclairage du temps des alertes […] » Il voulait créer une formule pour « celui qui recherche les innovations et les perfectionnements de la réalisation cinématographique […] avec des films sélectionnés, pour un public averti ». 60 ans après cette idée est toujours là.
Depuis, le Lido est sorti des sous-sols du Paris, mais il a gardé la même recette. Membre du réseau « Europa Cinemas » depuis plusieurs années, il s’engage à présenter au moins 30% de films européens non-nationaux ; en plus des habituels avant-premières, rencontres avec des réalisateurs, festivals cinématographiques ou films français et étrangers.
« En tant qu’indépendant, on s’attache à tous les types de cinémas. C’est sûr qu’on ne fera pas autant d’entrées qu’avec un blockbuster américain, mais ce n’est pas le rôle du Lido. Ce cinéma a un rôle plus éducatif auprès du public. Avec cette formule « Art et Essai », on veut aider les gens à apprécier encore plus le cinéma et qu’ils y passent du temps. Et ce rôle éducatif, sert aussi à intéresser les plus jeunes au cinéma et à leur faire découvrir autre chose ! » assume Bruno Penin.

Euphorie de la réouverture ou recette miracle, pour ce premier mois du « nouveau Lido », le cinéma a enregistré une hausse de la fréquentation comparée à celle d’avant sa fermeture. Pourvu que ça dure !
Info pratique
Vous pouvez retrouver toutes les séances du Lido sur le site grandecran.fr

