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vendredi 29 mars 2024

Nuages autour du projet de train du futur et du centre de recherche à Droux

Il ne s’est pas passé grand chose depuis 2018 et l’annonce par la société Transpod de la construction à Droux  d’une ligne expérimentale pour un train du futur inspiré de l’Hyperloop d’Elon Musk. Nos confrères de Sud-Ouest annoncent l’abandon du projet, et si rien n’est acté ni confirmé par Transpod, le doute est permis.

En 2012, après SpaceX et Tesla, le milliardaire Elon Musk annonçait un autre projet fumeux futuriste dont il a le secret : l’Hyperloop, un train à grande vitesse subsonique capable de se déplacer à 1200 km/h à travers un tube, en emportant ses passagers dans des capsules. Si très rapidement, Musk semble se détourner de ce projet, son entreprise Space X continue d’organiser des concours et d’encourager des entreprises à se lancer dans cette aventure.

C’est ainsi qu’en 2018, la startup canadienne Transpod débarque en Haute-Vienne où elle a trouvé le terrain idéal pour créer une piste expérimentale de 3 km, sur une ancienne portion de voie ferrée, et un laboratoire de recherche pour son projet baptisé « Fluxjet ».

Transpod dépose donc un permis de construire en 2018 et obtient une aide de 2 Millions d’€ de l’Union Européenne pour contribuer au développement d’une activité économique innovante et potentiellement créatrice d’emplois au cœur de la campagne haut-viennoise.

Mais la première phase du projet tarde à se mettre en route et l’épidémie de Covid-19 vient rajouter son lot de reports. Les grandes manœuvres n’ont toujours pas commencé et le centre qui devait être inauguré en ce mois de Septembre 2022 n’est pas sorti de terre. Un peu d’élagage, un compteur électrique et un accès à la fibre, voilà pour l’instant…

Sud-Ouest annonce l’abandon du projet, le PDG de Transpod refute et veut la paix

Il y’a 2 jours, nos confrères de Sud-Ouest publiaient un article annonçant l’abandon du projet. Sébastien Gendron, PDG de Transpod n’a pas souhaité confirmé ou infirmé cette information indiquant simplement que Transpod remboursera les aides publiques reçues pour avoir la paix. Pour l’instant, Transpod a touché une avance d’un peu plus de 500 000 € et aurait embauché 10 personnes pour la conception du centre de Droux.

Cet article a suscité de nombreuses réactions et surtout des « je l’avais bien dit ». De son côté, le président de l’association Hyperloop Limoges, veut encore y croire car la maquette du Fluxjet de Transpod présentée au mois de Juillet montre que le travail de développement est toujours en cours chez Transpod, sans pour autant être assuré de sa concrétisation…

Affaire à suivre donc, en attendant de plus amples informations de Transpod et surtout une confirmation de l’avenir ou de l’abandon du projet à Droux.

Manœuvre politique autour de l’Hyperloop, surenchère, premier abandon à Toulouse

En Août 2022, le célèbre magazine américain « TIME » révélait dans un article consacré à Elon Musk qu’il aurait confié à son biographe « qu’il s’agissait surtout avec Hyperloop de forcer les législateurs à annuler le projet de train à grande vitesse en Californie – même si il n’avait pas l’intention de le construire ». Et en effet, Musk via SpaceX s’est ensuite simplement contenté d’organiser des « concours de capsules » entre les grandes universités.

En ce début d’année, Musk revenait cependant à la charge en évoquant sur Twitter la possibilité de réaliser le projet Hyperloop en 1 à 2 ans si il le voulait vraiment, indiquant qu’un Hyperloop souterrain serait parfait car indépendant des conditions climatiques. Donc son idée c’est maintenant de construire des centaines de kilomètres de métro ? Toujours plus…

En attendant, d’autres entreprises comme Transpod ont travaillé de leur côté sur le projet. A Toulouse, une entreprise américaine a implanté son centre de recherche et recruté une bonne trentaine de spécialistes pour construire une piste de 320 mètres de long avant de renoncer au mois de décembre 2021 après des premiers essais apparemment décevants.

De son côté, Virgin Hyperloop a déjà réalisé des essais avec des passagers et Hyperloop TT a annoncé avoir déjà signé des accords pour l’ouverture de lignes. Mais réaliser ce projet de train du futur est bien plus complexe que prévu et ça avance donc très lentement.

 

Une innovation « vieille de 10 ans », en décalage avec la réalité de notre époque

Tout ce « buzz » autour de l’Hyperloop soulève néanmoins de nombreuses questions quand à l’intérêt d’un tel projet. Si au début des années 2010, l’Humanité pouvait encore feindre de ne pas voir le mur vers lequel elle fonce et Elon Musk pouvait faire rêver les technophiles avec des projets directement tirés de la science-fiction, la réalité est tout autre aujourd’hui.

L’Europe se prépare à affronter une crise énergétique sans précèdent, l’inflation galope et le climat s’affole… On peut se demander quelle est la cible de clientèle visée par ces trains à hyper-grande-vitesse ? Qui a besoin de se déplacer à une aussi grande vitesse et qui en a les moyens ? Car déployer un réseau spécifique de tubes sera un véritable gouffre financier et sans aucun doute un massacre environnemental mais surtout la consommation en électricité d’un tel équipement doit dépasser l’entendement. Alors on imagine bien que le prix du billet ne sera pas à la portée de tous.

Dans un contexte économique de plus en plus tendu, la SNCF envisage de son côté de lancer le « paiement par crédit » d’ici la fin 2022, marquant ainsi une belle régression pour un moyen de transport populaire devenu trop cher pour un bonne partie des français. Autant dire que si l’on ne peut plus se payer un billet de train « classique » sans étaler cette dépense sur plusieurs mois, on devra sûrement hypothéquer sa maison pour monter dans l’Hyperloop…

De quoi donner raison au philosophe Marc Halévy quand il déclarait en 2018 à propos d’Elon Musk : « Comme la vitesse de la lumière va beaucoup plus vite que la vitesse du son, on a d’abord cru qu’il était brillant, on verra très vite que c’est un gros c.. « 

Brice Milbergue
Brice Milbergue
Rédacteur en chef d'Actus Limousin

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