La filière numérique régionale se porte bien et ça ne devrait pas s’arrêter puisque les entreprises du secteur prévoient de recruter 3 000 salariés sur les quatre ans à venir. Dans un secteur particulièrement concurrentiel, la Région devra néanmoins faire face à de nombreux défis pour attirer de nouvelles compétences.
La filière numérique rassemble plus de 2000 entreprises en Nouvelle-Aquitaine et emploie plus de 32 000 salariés. Et si les perspectives d’embauches sont au beau fixe dans le secteur, la filière numérique régionale elle devra cependant surmonter de nombreux défis si elle veut attirer de nouvelles compétences dans un secteur particulièrement concurrentiel.
Pour préparer l’avenir et mettre toutes les chances de son côté, la Région et la DREETS ont signé, avec de nombreux partenaires, un Contrat Régional de Filière « Métiers des activités de service numérique et jeu vidéo » le 27 janvier à Pessac. Ce contrat fixe les objectifs et définit les actions envisagées pour répondre aux besoins des entreprises jusqu’en 2028. Il complète l’étude prospective régionale menée sur 2024-2028 et dont les conclusions ont été dévoilées, le 18 févier, à ESTER aux adhérents de l’Aliptic et aux acteurs économiques.
Commandée par les quatre clusters régionaux dont Aliptic (Limousin), et soutenue par la DREETS et la Région Nouvelle-Aquitaine, Numeum, France IT et l’OPCO Atlas, cette grande étude de la filière numérique de la Nouvelle-Aquitaine a été réalisée au second semestre 2024 auprès de 193 entreprises de la filière. Il s’agit de réaliser une photographie du secteur et de dessiner les perspectives à l’horizon 2028.
Une filière dynamique mais de fortes disparités régionales
La filière dans son ensemble génère plus de 6,7 milliards de chiffre d’affaires annuel. Elle est composée à 75 % de petites entreprises et d’agences qui réalisent moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires par an, majoritairement en prestation de services, et une entreprise sur 5 exporte. « La filière est consistance et pourvoyeuse d’emplois » indique le président d’Aliptic, Alexis Mons, « elle a presque doublé en cinq ans. C‘est environ 10 % des emplois de service en Nouvelle-Aquitaine, ce secteur devance la banque et emploie un gros volume d’alternants du supérieur. »
La filière numérique de Nouvelle-Aquitaine emploie 32 224 salariés dans 2 081 entreprises (88 % en CDI). En cinq ans, les effectifs ont progressé de 8,1 % par an et 2 500 nouvelles entreprises sont créées chaque année avec 70 % de pérennité à cinq ans.
On constate cependant de fortes disparités au sein de la région car 66% de ces emplois sont concentrés en Gironde, 11 % des salariés dans les Pyrénées Atlantiques, 15 % au nord de la région (Charente, Charente-Maritime, Deux-Sèvres et Haute-Vienne) et moins de 5 % sur les autres départements notamment en Limousin.
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Si un chiffre est à retenir, ce sont les 3 000 recrutements envisagés. Combien d’embauches seront réalisées en Limousin ? Difficile d’y répondre. « Il n’y a pas de raison que Limoges soit attractive mais il faut qu’on y travaille tous » suggère Alexis Mons, président de l’Aliptic, « on souhaite collaborer et faire des partenariats avec nos collectivités locales de proximité pour profiter de cette manne. On collabore déjà avec Limoges Métropole sur la cybersécurité, un sujet attractif. »
« Faire du business » et s’adapter
Cette étude permet aussi de pointer du doigt les difficultés rencontrées par les entreprises, notamment au niveau des ressources humaines, et de voir les leviers nécessaires pour affronter les enjeux de demain dans un contexte plus favorable. « En ce début d’année, on constate un frémissement de la demande » assure-t-il, « pour fin 2025 et pour le long terme, les chefs d’entreprises sont très optimistes. L’année 2024 a été morose au niveau économique mai aussi pour la filière numérique ce qui était nouveau. Les entreprises étaient habituées à avoir des croissances incroyables, ça s’est ralenti et l’attentisme a aussi touché la filière. »
Les objectifs des entreprises sont d’abord de faire du business « ce qui est nouveau comme priorité compte tenu de la morosité de l’an dernier » remarque-t-il. Elles comptent s’adapter face l’arrivée de l’IA. « Il y a un enjeu de performance atteste-t-il, cela va changer les emplois. Celles qui ne l’adopteront pas seront moins compétitives. » Le recrutement arrive en troisième préoccupation.
Objectif : féminiser la filière
La filière veut miser sur l’embauche de femmes alors que les postes sont trustés à 70 % par des hommes. L’effectif est passé de 25 % à 30 % en cinq ans. « C’est un combat permanent pour convaincre les filles » assure-t-il, « la filière numérique connaît le même problème que la filière scientifique. » Des opérations séduction ont été organisées auprès de collégiennes en leur proposant de passer une journée avec des femmes du numérique. « Le but est qu’elles se projettent pour avoir envie de faire comme elles » constate Marie-Pauline Carpentier, chargée de mission à l’Aliptic, « elles ont l’image de métiers réservés aux garçons, aux scientifiques avec des études longues et payantes. »
Des salaires nivelés par le haut
Les entreprises lorgnent sur les salariés en reconversion qui pourraient former la moitié des embauches afin de pallier au nombre insuffisant de jeunes diplômés. « On a un appel du pied du secteur automobile en ce moment » précise-t-il. Autre levier d’attractivité, la nécessaire actualisation de certains BTS qui seraient datés, obligeant des entreprises à former les diplômés à la fin de leur études « pour combler les manques et être employables. »
Malgré un déficit d’image, les entreprises régionales proposent des salaires attractifs qui ont bénéficié d’un alignement par le haut après la crise du Covid. Les disparités salariales au niveau régional ont disparu. « Il y avait une modération salariale sur Limoges mais c’est terminé désormais, toutes les entreprises recrutent France entière et en télétravail ce qui a aligné les salaires par le haut avec moins de 20 % d’écart sur les principaux métiers quel que soit soit la localisation en Nouvelle-Aquitaine. Et on n’est pas très loin de ceux de Paris. » assure-t-il.
Pour retrouver de l’étude prospective sur la filière numérique en Nouvelle-Aquitaine dans son intégralité, rendez-vous sur le site de l’Aliptic.