Dans le paysage radiophonique de Limoges, « Beaub’FM » c’est LA radio des musiques actuelles. Créée en 1987, la radio associative du quartier de Beaubreuil a réussi, avec son ton décalé et ses émissions variées, à se faire une place parmi les grands. Pourtant à la vieille du projet de loi de finance 2026, cette radio historique de Limoges est plus que jamais menacée…
Bump up the volume, installez-vous confortablement et zappez sur la fréquence 89. Si vous ne l’avez pas reconnue, il s’agit de la radio associative historique du quartier de Beaubreuil : Beaub’FM, une radio locale très attachée à son indépendance et à son quartier. Lors de son déménagement il y a 1 an et demi, la radio n’a pas été chercher son nouveau studio ailleurs. « Pour nous, il était inenvisageable de quitter le quartier parce que Beaub’FM sans Beaubreuil, ça n’a aucun intérêt », revendique Damien Chaminade, coordinateur d’antenne.
Mais ne vous y trompez pas, la radio rayonne et se développe en dehors de son quartier, de Limoges, et même des frontières de l’Hexagone; notamment grâce à son partenariat avec Ferarock, qui réunit 26 radios francophones pour mettre en valeur la musique actuelle, et permet à Beaub’FM de se faire connaître jusqu’au Canada ! Pour les limougeauds en quête de nouveautés musicales, la fréquence 89, c’est aussi la radio incontournable pour découvrir de nouveaux artistes du Limousin et d’ailleurs. Sa playlist pointilleuse, qui fait la part belle aux musiques actuelles, nous amène à la rencontre des scènes et des artistes émergents souvent passés sous le radar des radios nationales.
Beaub’FM c’est aussi la couverture et la promotion des événements culturels locaux, que ce soit dans ses émissions, mais surtout dans ses directs ! « On prend l’information locale pour mettre en avant les acteurs culturels et associatifs. Ça peut être dans des émissions où on va s’accorder un moment pour présenter une conférence ou la retransmission en live d’événement. Par exemple, une fois par trimestre, on va diffuser en direct un concert d’une salle de Limoges. C’est ça l’esprit de Beaub : de la découverte, mais surtout du direct ! », assume Damien, qui anime aussi au quotidien l’émission « SCRSHHH…. »
Donner sa chance à tous
Pour Beaub’FM comme pour beaucoup de radios, tout commence avec la fin de l’ORTF et l’accès aux ondes par les privés. C’est comme ça qu’en 1987, trois adolescents du quartier de Beaubreuil décident de fonder « Beaub’FM », accompagné de Pierre Laurent depuis devenu président d’honneur de la station. Un membre honorifique qui anime toujours la première et mythique émission de la radio : Accordéon club. « Quand, Beaub’FM a été créé, c’était pour diffuser de la musique et parler du quartier de Beaubreuil. Rapidement, la radio s’est spécialisée dans les musiques actuelles et s’est étendue à tout Limoges. Puis, avec le temps, elle est devenue plus professionnelle avec le recrutement de ses premiers salariés. A l’arrivée d’internet, la radio est passée dans une autre dimension. La station a tout de suite été disponible en ligne et ça nous a permis de drainer beaucoup de nouveaux auditeurs », explique Damien Chamade.
Mais Beaub’FM, c’est surtout une volonté de donner sa chance à tous de faire de la radio et parmi ses salariés et ses bénévoles, aucun n’est passé par de grandes écoles de radio ou même de journalisme. Aidés par les plus expérimentés, les petits nouveaux ont tout appris devant le micro ! Preuve en est, Damien Chaminade, l’actuel coordinateur de l’antenne était électricien avant d’atterrir à Beaub’FM ! « On se forme tous les uns et les autres. Que ce soient nos bénévoles qui viennent compléter nos grilles avec leurs émissions aux thèmes très variées ou même nous, les salariés. L’esprit Beaub c’est de donner sa chance à tous et notamment à ceux qui ne sont pas de ce milieu-là, mais ont quand même des choses à dire ! », confie-t-il.
Ce qui fait la force de Beaub, ce sont sa soixantaine de bénévoles qui animent au quotidien la radio. « Le Cercle » pour l’actualité du CSP, « Bande de Cloches » pour la littérature, l’art et les expositions du moment, et des dizaines d’autres émissions variées qui permettent aux auditeurs d’en prendre plein les oreilles ! Ce sont aussi ces mêmes bénévoles, mais aussi les donateurs amoureux de la station qui ont permis à la radio d’installer sa nouvelle antenne ; un investissement financier obligatoire que ne pouvait pas se permettre la radio.
Hors antenne, Beaub’FM s’investit
Limiter Beaub’FM à son côté musical serait un affront, car depuis plusieurs années, la station mène aussi de nombreuses actions auprès de différents publics : de l’éducation aux médias à des ateliers de création de podcasts, en passant par la découverte des studios et l’initiation à la radio… Le rôle de Beaub’FM va bien au-delà des ondes et de murs des studios. « L’intérêt de la radio, c’est d’être transportable, et on exploite ce potentiel ! Au centre social de Beaubreuil, on développe un podcast sur la laïcité avec des personnes du quartier. On développe aussi des projets de podcasts avec des scolaires dans plein d’établissements du coin. L’objectif, c’est vraiment de donner l’occasion aux gens de s’exprimer ! » résume Damien Chaminade
Une radio essentielle et pourtant plus que jamais menacé
Seulement voilà… Ces beaux projets mêlant éducation populaire, découverte du monde de la radio et exploration musicale sont plus que jamais menacés. En cause, le nouveau projet de loi de finance 2026, qui prévoit une réduction de 44% du budget du « Fonds de soutien à l’expression radiophonique » (FSER). Une coupe budgétaire qui signifie la perte de 40 à 60 % de leur financement pour 770 radios associatives dont fait partie Beaub’FM ; qui de par leurs statuts ne peuvent tirer aucun revenu de la publicité. « Quand on s’y penche de plus près, la baisse ne fait gagner que 16 millions à l’Etat sur un budget de 501 milliards ! Que ce soient les radios associatives, les politiques, les acteurs locaux, et même les radios privées, personne ne comprend… », s’étonne le coordinateur de l’antenne de Beaub’FM.
Une économie qui entraînerait la disparition de la moitié des radios associatives et de 2400 emplois. Du côté de Beaub’FM, qui s’en sort « presque bien » si l’on ironise, ce sont 2 de ses 4 employés qui seront licenciés si ce projet de loi de finance est voté. « Avec une telle réduction, nous serions contraints de supprimer une bonne partie de nos programmes, mais surtout, nous ne pourrions plus assurer nos actions auprès des Limougeauds. Ce qui, soyons honnête, tuerait l’esprit Beaub’FM a petit feu », alerte Damien Chaminade.
Beaub’FM, Radio trouble fête, Emergence, Radio Pays de Guéret… et bien d’autres, ce sont donc tous ces relais ancrés dans les territoires, qui donnent la parole aux acteurs locaux et aux habitants, permettent à certains de se faire connaître, à d’autres de revendiquer ou de présenter leurs projets, et participent ainsi activement à la démocratie locale, qui sont à nouveau menacés.
L’an dernier, le couperet était déjà passé près mais le gouvernement avait finalement fait machine arrière pour permettre, selon les mots de Laurent Saint-Martin, alors ministre du budget, « à ces 750 radios locales associatives de continuer d’émettre, de continuer à assurer ce lien de proximité mais aussi de développement de lien social et surtout assurer, ce qui est très important dans notre pays, le pluralisme dans l’information ». Paroles, paroles, paroles…
Info pratique
Vous pouvez retrouver Beaub’FM sur la fréquence 89 mhz, sur les plateformes de diffusion radiophonique ou sur leur site beaubfm.org
Vous pouvez aussi retrouver leur podcast et leur émission sur le site.
Et pour soutenir l’association et souhaitez longue vie à Beaub’FM, c’est par là !
