Des flots de la Diège aux torrents tchèques : l’épopée en or des canoéistes corréziens Corentin Combe et Clément Monjanel

Après un premier sacre mondial en 2024, puis un titre de champions d’Europe en juin dernier, Clément Monjanel et Corentin Combe sont à nouveau au sommet avec une nouvelle médaille d’or aux Championnats du monde de canoë de descente. De retour à Ussel, leur « pays », les deux céistes reviennent sur cette saison.

Le cou des deux athlètes était à peine assez grand pour supporter le poids des médailles d’or, samedi dernier, au sein du Haute-Corrèze Kayak Club à la base nautique du Roudal à Ussel. Trois semaines après un nouveau sacre mondial (le deuxième en deux ans), Clément Monjanel et Corentin Combe étaient en Corrèze pour célébrer leur titre de champions du monde décroché en République Tchèque, le 20 septembre dernier. Et il y avait foule pour trinquer, se retrouver, partager l’expérience vécue et immortaliser le moment avec ceux qui sont toujours licenciés du club ussellois.

« Ça fait plaisir de fêter cette victoire avec nos proches, nos entraîneurs Julien Lafeuille et Cyril Leblond, mais aussi avec tous les jeunes et moins jeunes kayakistes du Limousin et les élus qui ont fait le déplacement ce soir. On sait qu’on est soutenus, c’est important », ont confié les sportifs membres de l’équipe de France entre deux autographes.

Le duo de champions entouré de ses deux entraineurs : Julien Lafeuille et Cyril Leblond © Jérémy Truant

Il faut dire que c’est ici, sur la rivière de la Diège à Ussel que tout a commencé pour les deux céistes âgés de 24 et 26 ans. Alors forcément, le retour aux sources était primordial pour fêter le graal. « Ils ont performé au plus haut niveau cette année, ils ont tout décroché, ils ne peuvent pas faire mieux », s’est réjoui leur coach Julien Lafeuille.

Des médailles d’or en cascade mais trop peu de moyens

Et pour cause, les deux compères ont réalisé LA saison parfaite à bord de leur canoë biplace en descente sprint : une médaille d’or aux championnats d’Europe en Italie en juin dernier, une Coupe du Monde et un titre de champions du monde en République Tchèque (après un premier titre en 2024). À cela s’ajoutent également des victoires en équipe. Le résultat est au-delà de leurs attentes et les athlètes s’en réjouissent : « On a réussi quelque chose qui nous paraissait impossible ! Mais maintenant ça va être difficile de faire mieux, on est au max ! »

#2 et autant de titres de champions du Monde, il y a de quoi avoir le sourire ! © DR

Difficile de faire mieux mais surtout avec quels moyens ? Comment continuer à performer au plus haut niveau mondial d’une discipline malheureusement peu médiatisée ? C’est toute la difficile équation que doivent résoudre les sportifs qui combinent entraînements intensifs et vie professionnelle en parallèle (l’un est professeur de sport, l’autre maître-nageur).

« Cette saison, on l’a beaucoup vécue grâce à nos fonds propres, avec une aide de la Région et du Département aussi et on a terminé d’utiliser la cagnotte qu’on avait lancée en 2022 », nous confesse le duo. Parce que le budget d’une telle aventure sportive est forcément élevé : les stages, le matériel, les déplacements … La liste est longue. « Rien que pour les compétitions et les stages, on a déboursé 1 300 € chacun cette année », calculent Clément et Corentin.

À la recherche de soutiens financiers

Loin du football ou du rugby par exemple, les céistes ne peuvent finalement compter que sur eux-mêmes (ou presque), dans un sport qui n’est pas olympique et donc très peu connu du grand public. « Les aides s’amenuisent et c’est compliqué d’aller trouver des sponsors pour une discipline si peu mise en avant », poursuivent les Corréziens toujours à la recherche de sponsoring ou de mécénat (via l’association du Haute-Corrèze Kayak Club).

L’autre objectif, « montrer aux jeunes que tout est possible, que lorsqu’on se donne les moyens, on peut y arriver. Et quand on voit tous les petits kayakistes qui participent aux écoles de pagaie les mercredis et samedis, on se dit que la relève est assurée », ont lancé les champions lors d’un petit discours samedi soir.

« Montrer aux jeunes que tout est possible », nul doute que le duo inspire déjà la jeune garde de la pagaie corrézienne ! © Jérémy Truant

Un discours en forme de passage de relais ? Pas du tout. « On va essayer de se maintenir en équipe de France et au sommet mondial », concluent Corentin et Clément. Pour ce dernier, l’entraînement se déroulera désormais à l’autre bout du monde, puisqu’il a décidé d’aller vivre, pour un temps, sur l’Île de la Réunion. « Je reviendrai pour les sélections en équipe de France et pour m’entraîner avec Corentin. On s’entraînait déjà chacun de notre côté (l’un était à Paris, l’autre à Toulouse, ndlr), on sait que cela fonctionne, on l’a prouvé. » Prouver qu’ils s’accrochent, qu’ils aiment leur sport, leur « pays » et qu’ils sont fiers de le représenter à l’international, voilà ce à quoi vont continuer de s’atteler les Corréziens.

Dans le reflet de leurs médailles, on lit l’histoire de deux gamins Limousins qui ont refusé de lâcher la rive, même quand le courant était contraire. Et quelque part, sur la Diège, les jeunes du club pagaient déjà dans leur sillage, avec ce même rêve au creux de la main : montrer que tout est possible.

Jérémy Truant
Jérémy Truant
Journaliste Actus Limousin
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