À quelques kilomètres d’Argentat (19), dans une zone classée « plus grande réserve de biosphère française » par l’UNESCO, l’imposant barrage du Chastang se dresse sur la Dordogne. Ce géant hydro-électrique est ré-ouvert depuis peu au public, avec un espace didactique « Odysselec » entièrement repensé.
Un barrage né après la guerre
La décision de construire le barrage du Chastang est intégrée dans le plan d’aménagement de la Dordogne défini après la Première Guerre mondiale et la crise du charbon, mais le projet ne prend véritablement son essor qu’en 1947. Les travaux, d’une ampleur titanesque, s’étaleront sur quatre années, sans compter les préparatifs. L’une des prouesses techniques les plus remarquables fut l’assèchement de la zone de chantier. Pour poser les fondations, il aura fallu détourner temporairement la Dordogne. La solution ? Creuser une galerie dans le flanc de la colline pour faire passer la rivière ailleurs pendant les travaux. Ce tunnel, dont on peut encore apercevoir l’entrée, témoigne de l’ingéniosité déployée à l’époque.

Pas moins de 1500 ouvriers ont participé à cette construction, formant une véritable ruche où se côtoyaient des travailleurs de nombreuses nationalités. Le village voisin de Glény s’est alors transformé en une « petite ville » de 3000 habitants avec restaurants, cinéma et écoles. Aujourd’hui, quelques noms portugais dans les environs et la façade d’une église sont les derniers témoins de cette effervescence passée.
Des chiffres vertigineux
Le barrage de Chastang impressionne par ses dimensions : 79 m de haut, 300 m de long et une épaisseur qui va de 6 à 23 mètres. Sa forme combine les avantages des barrages-poids et des barrages-voûtes pour retenir 187 millions de mètres cubes d’eau (l’équivalent de 75 000 piscines olympiques !). Grâce à sa retenue longue de 31 km et ses trois turbines de type « Francis » de 50 tonnes chacune, le barrage a une production annuelle équivalente à la consommation résidentielle d’une ville de la taille de Limoges.

Pour construire cet ouvrage, 350 000 m³ de béton ont été nécessaires, acheminés non par la route mais par téléphériques. La tour à béton, normalement dynamitée une fois les travaux terminés, a été préservée, car la production d’électricité avait déjà commencé avant la fin complète du chantier, rendant dangereuse toute explosion à proximité des installations électriques !
Au fait, comment ça marche un barrage hydroélectrique ?
- Le principe de fonctionnement d’un barrage de ce type est finalement assez simple : l’eau retenue forme un lac artificiel qui constitue une réserve d’énergie potentielle.
- Lorsque les besoins en électricité augmentent, des vannes s’ouvrent pour que l’eau s’engouffre dans de longues conduites forcées qui la mène vers la centrale hydraulique située en contrebas.
- La force de l’eau fait tourner une turbine qui entraîne un alternateur, produisant du courant électrique. La puissance générée dépend de la hauteur de chute et du débit.
- Après avoir cédé son énergie, l’eau rejoint la rivière par un canal de fuite.

Un fonctionnement automatisé
La visite conduit dans la salle des commandes, étonnamment déserte… La raison est simple : depuis les années 1980, le barrage est automatisé et fonctionne désormais sans présence humaine permanente.
« Il est géré à distance depuis un centre de contrôle situé à Toulouse. Seuls les cinq techniciens d’exploitation travaillent sur place, pour assurer la maintenance et relever les outils de mesure. La nuit, les week-ends et les jours fériés, le barrage fonctionne sous la surveillance de caméras et d’alarmes, avec une astreinte qui permet une intervention rapide en cas de problème. » nous explique notre guide.
L’unique élément encore géré depuis la salle des commandes concerne les évacuateurs de crues, ces immenses « toboggans » visibles de l’extérieur. En cas de fortes pluies, quand trop d’eau arrive dans le lac de retenue, ces vannes peuvent être ouvertes pour évacuer plusieurs milliers de m³ par seconde et éviter que l’eau ne passe par-dessus le barrage.
Une nouvelle expérience de visite pour 2025
L’année 2025 marque un renouveau avec la réouverture du barrage du Chastang et de son espace « Odysselec » au public depuis le 6 avril. Le parcours pédagogique a été entièrement repensé en partenariat avec le « Carrefour des Sciences » et présente, aux petits comme aux grands, des dispositifs didactiques pour comprendre les principes de production d’électricité tout en explorant l’histoire et les particularités du site.

Les visites guidées sont proposées tous les après-midis, du dimanche au vendredi pendant les vacances scolaires, avec des sessions en anglais une fois par semaine l’été.
Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site barrage-chastang.com