À première vue, rien ne laisse présager la richesse du jardin des Vitailles mis à part le panneau « Jardins remarquables » qui précède un petit portillon en bois. Mais une fois le portail franchi, c’est un jardin richement boisé, façonné depuis 1995 qui s’offre à la vue du visiteur.
Niché au cœur du Limousin, à Saint-Yrieix-La-Perche, le jardin de Jean-Louis Reix et de son épouse Annie m’a donné l’impression de plonger dans un autre univers. Les arbres et les essences s’y entremêlent, le jardin est ponctué de divers points d’eau, et les arbres centenaires côtoient des plantations récentes. Fruit de la patience et de la passion d’un homme, ce jardin reflète une vision singulière : celle d’une forêt rêvée, entre ordre et liberté.
Le jardin des Vitailles, né des mains d’un ébéniste
Ebéniste de métier, Jean-Louis Reix a mis le même soin dans la composition de son jardin que dans le travail du bois en s’appuyant sur ses lectures et sur ses visites de jardins pour nourrir son inspiration. En cheminant, je l’interroge sur la genèse du jardin et sur ce qui l’a amené vers cette passion pour le végétal : « Enfant déjà, je m’amusais à prélever de jeunes arbres en forêt, à l’endroit même où nous nous trouvons, pour les replanter dans mon propre jardin. Mais la place a rapidement manqué et j’ai eu ce rêve d’avoir ma propre forêt dans laquelle la tronçonneuse serait bannie. »

En 1995, Jean-Louis Reix acquiert son premier terrain, celui qu’il appelle encore aujourd’hui le « jardin du haut » et qui est composé d’arbres plusieurs fois centenaires. Son rêve d’avoir sa propre forêt se concrétise en 2006, lorsqu’il acquiert son deuxième terrain, « le jardin du bas », plus vaste et plus riche en reliefs naturels. Là, fort de ses « expériences jardinesques » passées, il a pu donner libre cours à son imagination : il plante serré des variétés vues dans des livres où dans divers jardins. « Le plus difficile ce ne sont pas les plantations » plaisante-t-il, « mais les noms latins des plantes, très éloignés de tout ce que je connais ! ».

Quel jardin extraordinaire !
S’étendant sur plus d’un hectare, le jardin surprend par son foisonnement et tous ces passages qui lui donnent un côté magique. Dans le jardin du haut, je découvre de très beaux arbres, des bambous également, le tout dans cette atmosphère feutrée qui n’existe que dans les forêts. Une arche ronde m’accueille à l’entrée du jardin du bas et marque la transition vers cette deuxième partie, plus ouverte et marquée par la forte présence de l’eau et de plantes très colorées !

La verticalité des prêles annonce les deux petites pièces d’eau, toute en rondeur qui accueillent des nénuphars et leurs grenouilles. Les arbustes qui entourent l’ensemble sont taillés tout en courbe, des fruitiers sont disposés çà et là et de magnifiques jeux de feuillages et de couleurs s’offrent aux yeux du visiteur. L’ambiance de ce jardin est paisible et accueillante : j’y croise des érables, des graminées qui ondulent dans le vent et des fougères qui se plaisent vraiment beaucoup dans cet endroit humide !

Jean-Louis a pris le parti de planter serré pour se rapprocher de son rêve de forêt. Il a conservé le relief déjà existant en l’agrémentant par des passages, des tunnels végétaux, des points d’eau et des kiosques recouverts de rosiers. Aujourd’hui, les plantations sont terminées, il ne lui reste plus qu’à entretenir, en laissant la nature suivre son cours et en préservant la fluidité des cheminements. Le bruissement incessant des insectes rappelle que ce jardin n’est pas seulement un décor : c’est un écosystème vivant. D’ailleurs en passant à côté du tilleul de Henry (Tilia henryana) très particulier aux feuilles ciliées qui dégage un parfum incomparable, c’est tout un concert assourdissant de butineurs en tout genre qui viennent butiner toutes ces jolies fleurs (et on les comprend).

Les arbres remarquables
Vous pensez que je me balade juste pour admirer des palettes d’arbres et d’arbustes tous différents les uns des autres ? Alors oui, mais également pour les arbres remarquables tant par le choix des essences que par leur âge ! Dès l’entrée dans le jardin du haut, je suis frappée par ces magnifiques châtaigniers (fleuron Corrézien) qui sont âgés de plus de trois siècles ! Non loin, d’immenses pins douglas dressent leurs troncs bien verticaux vers les cieux et contrastent fortement avec l’ouverture ronde qui permet aux visiteurs de passer d’un jardin à l’autre. Ces pins donnent aujourd’hui tout leur caractère à ce paysage.

À côté de ces monuments végétaux, la collection plus récente de Jean-Louis s’exprime avec éclat : des hortensias, des rosiers, des saules têtards, des noisetiers tortueux… Tous ces arbres plantés de manière rapprochée forment aujourd’hui une dense canopée qui illustre à merveille l’idée première d’une forêt-jardin. Allez vous y promener, vous y verrez sûrement apparaître le chien de Jean-Louis Reix, Sam, un beau setter, souvent trop pressé pour se laisser photographier.

Plus qu’un simple jardin d’ornement, le jardin des Vitailles est un manifeste en faveur de la passion, de la patience et surtout de l’amour des arbres. Entre rigueur d’ébéniste et passion arboricole, Jean-Louis a su transformer un ancien pré en un sanctuaire de verdure. Les visiteurs qui franchissent le portail découvrent bien plus qu’une collection botanique : un lieu vivant où l’on comprend que la forêt peut naître de la main d’un homme.
INFOS PRATIQUES
Les Vitailles, 87500 Saint-Yrieix-la-Perche
Tel : 06 84 44 74 24
Ouvert de mai à septembre de 10h à 12h et de 14h30 à 19h.
Animaux acceptés