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Région Limousin
samedi 25 octobre 2025

« Première fois » : Pauline découvre enfin (!) le monde merveilleux des champignons dans la forêt de Sédières…

Pauline a rejoint notre équipe au début de l’année dernière, peu de temps après avoir débarqué en Corrèze. Mais ce n’est que cette année qu’elle nous a confié son « lourd secret » : elle n’était encore jamais allé aux champignons ! Impossible pour nous de la laisser dans une telle situation et c’est donc en compagnie de Romain Pietrolongo et de Claude Gonthier, de la toute nouvelle Association Mycologique de Corrèze, que nous l’avons envoyé faire sa première cueillette dans la forêt de Sédières…

En ce moment, Limousins que vous êtes, vous n’êtes sûrement pas passés à côté : c’est la grande saison des champignons ! « Très en avance cette année ! », enfin c’est ce qu’on m’a dit parce que je dois bien avouer que moi je n’y connaissais pas grand-chose, à part la photo de l’amanite tue-mouche accrochée dans ma classe de CP… Mais cette année, impossible d’y échapper : les forêts corréziennes débordent de champignons ! L’occasion rêvée d’aller en forêt pour découvrir ces mystérieux organismes et essayer de comprendre de qu’ils ont à nous dire sur la santé de nos bois.

Le charme de la forêt limousine, paradis (en péril ?) des chercheurs de champignons ! © Pauline Sutter

C’est aux côtés de Romain Pietrolongo (président et guide mycologique) et Claude Gonthier (secrétaire général et référent gastronomique), de « l’Association mycologique de Corrèze » (A.M.C.), que je me suis rendue dans la jolie forêt domaniale du château de Sédières, un lieu particulièrement propice à la découverte du monde fongique. Fondée en février 2025, l’AMC regroupe des passionnés, des pharmaciens, des botanistes, des référents en mycologie mais aussi des arboristes et des herbalistes. Leurs objectifs : partager leurs connaissances, faire connaître la diversité des champignons et inventorier les espèces présentes sur le territoire.

Romain Pietrolongo et Claude Gonthier, mycophages mais surtout mycophiles et membres de la toute nouvelle Association Mycologique de Corrèze © Pauline Sutter

Un réseau invisible sous nos pieds

Ni plante, ni animal, le champignon appartient au règne fongique, un monde à part où tout se joue sous terre. « Ce qu’on ramasse n’est que la partie émergée de l’iceberg » m’explique Romain « le vrai champignon vit sous nos pieds, sous forme de filaments, le mycélium qui s’étend sur plusieurs kilomètres. Certains vont même se connecter aux racines des arbres pour les aider à se nourrir et à se défendre. » Sans les champignons, pas d’échanges nutritifs, pas de régénération des sols, et donc pas de forêts telles que nous les connaissons.

Pour Claude Gonthier, initialement simple « mycophage » comme beaucoup d’entre nous, la passion s’est transformée en véritable respect : « On devient vite mycophile, amoureux du champignon pour ce qu’il est, pas seulement pour ce qu’il nous apporte à table. » C’est dans cet esprit que l’A.M.C. participe aux inventaires nationaux menés par la Société mycologique de France, afin de suivre l’évolution des espèces et de détecter celles menacées de disparition.

Ces inventaires permettent aussi la découverte d’espèces extrêmement rares, comme ce  bolet jonquille (Neoboletus junquilleus), classé « à protéger », que Claude et Romain ont découvert pendant notre balade.

Les inventaires servent à suivre l’évolution des espèces et à faire des belles découvertes comme ce rare « bolet jonquille » © Pauline Sutter

Cueillette responsable : où sont mes cèpes et mes girolles ?

Aller “aux champignons” est un rituel automnal incontournable en Limousin. On y cherche surtout les cèpes, girolles, chanterelles et trompettes-de-la-mort, véritables trésors gustatifs. Mais derrière la balade bucolique se cache aussi un geste écologique : cueillir, oui, mais sans épuiser le milieu.

Quelques règles simples permettent d’allier plaisir et respect de la nature :

  • Demandez toujours l’autorisation : 99 % des forêts corréziennes sont privées.
  • Marchez prudemment : le piétinement répété abîme les mycorhizes et empêche les champignons de se reproduire.
  • Laissez quelques exemplaires : cueillir tout un groupe revient à stopper sa reproduction.
  • Utilisez un panier en osier, jamais un sac plastique : au contact du plastique les champignons produisent de la cadavérine et de l’ammoniac entre autres !

En forêt, les cèpes (Boletus spp.) se plaisent sous les résineux ou près des bouleaux, tandis que les girolles (Cantharellus spp.) préfèrent les lisières et les chemins creux. Une fois votre butin trouvé, un petit test s’impose : tapez doucement sur le chapeau du cèpe : s’il sonne plein, il est sain et sans ver ! Pour les girolles, c’est une odeur fruitée proche de la mirabelle qui vous assurera de leur fraicheur.

Plaisir des yeux, plaisir du palais ! En Limousin, cèpes et girolles sont de vrais produits du terroir © Pauline Sutter

Mais même avec les meilleures trouvailles, Romain et Claude insistent : « Cueillir, c’est bien, mais observer, c’est encore mieux. Chaque champignon raconte une histoire : du climat, du sol, de la forêt. »

Un monde fongique haut en couleur

Mais le monde des champignons ne se limite pas à la poêlée du dimanche ! Il est plein de surprises, de couleurs et de petits mystères naturels. En voici quelques uns qui m’ont particulièrement marqué :

  • Les larmes des lactaires : certains champignons, comme les lactaires (Lactarius deliciosus), « pleurent » un lait orange lorsqu’on les entaille.
  • Les couleurs : les espèces les plus vives ne sont pas forcément les plus comestibles, mais quelle beauté ! L’amanite tue-mouche (Amanita muscaria), rouge à pois blancs, en est devenue le symbole.
Avec son rouge éclatant et ses points blancs, l’amanite tue-mouche est quand même un magnifique champignon ! © Pauline Sutter
  • Les changements de couleur : certains champignons changent de couleurs quand on les coupent, en réagissant presque instantanément à la lumière et à l’air. C’est le cas du bolet indigotier (Gyroporus cyanescens).
De jaune-beige à bleu en un instant, le bolet indigotier change de couleur quand on le coupe © Pauline Sutter
  • Le fleurissement du mycélium : avant l’apparition de nos compagnons aux petits chapeaux, un fin feutrage blanc se développe sur le sol ou le bois en décomposition. Ce n’est pas de la mousse, mais bien la promesse de futurs champignons !
Quand le mycelium fleurit… © Pauline Sutter
  • Les odeurs : farine pour le « meunier » (Clitopilus prunulus) – ce champignon blanc à l’odeur de farine qui indiquerait la présence de cèpe – ou d’encre pour d’autres ; les forêts corréziennes deviennent un véritable laboratoire olfactif après la pluie.
  • Les formes étranges : « ronds de sorcière », lignes parfaites, escalade… les champignons sont capables d’une incroyable variétés de combinaisons géométriques ou esthétiques !
Certains tentent le tout pour le tout pour se faire remarquer ! © Pauline Sutter

Les amateurs le savent : après quelques jours d’humidité, les sous-bois s’animent et les chapeaux bruns, orangés ou dorés refont surface, apportant cette odeur si particulière de terre et de mousse. En attendant les prochains rayons de soleil, souvenons-nous que les champignons sont bien plus qu’une gourmandise de saison : ils sont les architectes invisibles de nos forêts limousines. Et pour moi c’est sûr, cette première sortie « aux champignons » restera gravée dans ma mémoire et sera j’en suis sûr de plein d’autres, ne serais-ce que pour le plaisir des yeux !

Infos pratiques

Association mycologique de Corrèze (A.MC) – Adhésion annuelle : 10 €

Site web : asso-myco19.webnode.fr / Mail : asso.myco19@gmail.com

Sorties encadrées de mai jusqu’à fin novembre. Sur donation libre.

L’AMC propose aussi un étonnant « musée mycologique itinérant » et s’installe tout au long de l’automne sur de nombreux événements sur le territoire corrézien…

Brice Milbergue
Brice Milbergue
Rédacteur en chef d'Actus Limousin

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