Les travaux se poursuivent devant la cathédrale Saint-Étienne à Limoges mais on peut désormais apercevoir la voie romaine, les vestiges de l’église Saint-Jean et la mise en valeur du baptistère découvert en 2005. Il faudra attendre le printemps pour pouvoir les admirer de plus près.
Après les travaux de la place et de la rue Neuve-Saint-Étienne, de la rue de la Cathédrale et de la rue Haute-Cité, les entreprises (*) sont à pied d’oeuvre depuis plusieurs mois au pied de la Cathédrale Saint-Étienne, rue Porte-Panet. Un quartier qui poursuit sa métamorphose avant que le public ne puisse à nouveau y fouler les pavés, tout neufs, au printemps. Sur ce site chargé de 2 000 ans, « Augustoritum » se dévoile un peu plus. C’est ici même qu’en 2005, des campagnes de fouilles archéologiques, menées à l’occasion du projet de réfection de la place, ont révélé les vestiges d’un imposant baptistère. Il s’agit de l’une des plus anciennes constructions de ce genre en France qui jouxte également une voie antique.

Ce baptistère classé monument historique est resté en place, en sous-sol, en raison de son état dégradé. La Ville de Limoges a donc cherché comment mettre en valeur ce monument majeur du patrimoine et les vestiges seront matérialisés en surface par une cuve baptismale en béton et des départs de murs symbolisant l’édifice. « On contemple 2000 ans de vestiges et c’est un mille-feuille d’occupation dans le coeur historique de Limoges » souligne l’archéologue de la DRAC, Fabien Loubignac, « les vestiges emblématiques du secteur ont été mis en valeur comme ce bâtiment paléochrétien qui est aux origines de la cathédrale, daté du 5e siècle remanié à partir du 6e époque où il va être transformé en église paroissiale. »
Conserver pour transmettre
Lors de sa découverte, il a immédiatement été classé monument Historique car il est rare en France de trouver un tél édifice. Celui-ci présente une architecture particulière en forme d’hexagone. « Il y avait une salle de chaque côté et une piscine baptismale au centre qui se trouve aujourd’hui entre 50 cm et 1 m en sous-sol » indique-t-il, « il n’était pas valorisable, les vestiges ont souffert par les canalisations, les réseaux et la voirie. Je l’ai fouillé il y a 20 ans et on avait du mal à comprendre le plan. Le but est de le conserver en l’état pour le transmettre aux générations futures. »
La Ville a donc choisi d’évoquer ce monument par l’implantation de modules qui visent à refléter ses dimensions. Le bâtiment était imposant et devait se voir de loin. « ll devait être majestueux au 5e siècle en forme d’étoile » convient-il, « ce n’est pas exceptionnel de trouver aujourd’hui des baptistères à plan centré mais cet hexagone, la décoration, la mise en scène et son évolution sont exceptionnels. »
Dans son résumé suite aux fouilles archéologiques de 2005, Julien Denis décrivait ce que pouvait être ce remarquable édifice. « Le baptistère de Limoges se présentait sous la forme d’une vaste salle hexagonale (les côtés ont 5,60 m de large, soit l’équivalent d’un diamètre compris entre 10 et 11 m) organisée autour de la piscine baptismale. Cette salle était prolongée par six pièces quadrangulaires (des absides ?) rayonnant sur chacune des faces de l’hexagone. Les pièces rayonnantes avaient toutes des dimensions intérieures de 4,60 m de large sur 3,60 m de profondeur, […] Elles donnaient sur la pièce centrale par des ouvertures larges de 4 m probablement surmontées d’un arc. Le seul accès identifié du baptistère est une porte (murée par la suite) aménagée dans le mur ouest de l’abside ouest et large de 1,60 m. […] Au total, l’édifice avait une emprise au sol de 290 m², ce qui le range parmi les plus grands baptistères des Gaules. » (Sources : hades-archeologie.com)

Le géo-radar très utilisé à Limoges
Sa toiture était en terre cuite orangé avec de la roche décorative, les archéologues avaient d’ailleurs retrouvé des restes de tuile romaine (tegula). Le bâtiment n’était pas isolé mais entouré d’habitations dont certaines se trouvent maintenant sous la cathédrale. A proximité, un jardin des vestiges est en cours d’aménagement.

Les visiteurs pourront découvrir une partie de voie romaine qui sera également valorisée par la création d’un espace végétalisé et admirer des vestiges de l’église Saint-Jean. Certaines dalles de la voie antique mesurent plus d’un mètre et dateraient du 3e siècle. Les fouilles ont montré qu’il y avait des bâtiments romains alignés le long de la voie. « On connaît moins mais il faut imaginer un quartier de la fin de l’Antiquité qui s’installe dans ce secteur » précise Fabien Loubignac, « le géo-radar passé par le l’INRAP a scanné le sous-sol à notre demande. On a des bâtiments complètement inconnus dans l’orientation de cette voie. On cherche toujours la ville du bas empire où on se repliait derrière des remparts comme à Carcassonne. On pense qu’elle trouve ici mais on cherche encore les remparts.»

Cette technologie, qui sert normalement à détecter les réseaux souterrains, a été détournée pour l’archéologie. Au point que près de 100 hectares de surface ont été scannés à Limoges au gré des projets publics ou privés. « Limoges fait partie des villes en Europe où on a le plus de géo-radar appliqué à ce domaine » signale-t-il.
Une typo très médiévale
C’est l’émailleuse Lise Rathonie et l’artiste Adrien Aymard qui ont été sollicités pour créer une signalétique originale sur les murs de ce jardin patrimonial. Ce dernier a d’ailleurs conçu une typographie spéciale qui ornera le texte qui retracera l’histoire du baptistère. Des insertions sont déjà visibles sur le baptistère. Il a puisé son inspiration dans les incunables médiévaux, ces premiers livres imprimés datant de la fin du XVe siècle. L’artiste voulait créer une œuvre qui traverserait le temps, comme les pierres du baptistère. Il a donc fait le choix d’utiliser des lettres légèrement gothiques en écho à l’architecture du site tout en respectant le lieu. Et le lien avec l’émail, patrimoine vivant de la ville, s’est imposé naturellement.

La livraison du chantier est prévue pour le printemps 2026. Le coût des travaux s’élève à un peu plus de 2 millions d’euros avec des cofinancements du Département (270 540 €), du FEDER (37 500 €), de la Région (30 538,50 €) et de la DRAC (15 098 €).
* Les travaux sont réalisés par les entreprises Eurovia, Blanchon, Mommers, Laguarrigue, Batifoix, Limousin Paysage avec une touche artistique de Lise Rathonie et Adrien Aymard.

