Ouvert le 16 juillet 1999, le Centre de la mémoire Oradour-sur-Glane rappelle le drame qui s’est déroulé dans ce village le 10 juin 1944. Pour faire face à de nouveaux enjeux de transmission de la mémoire, le département va engager d’importants travaux, à partir de l’automne 2025, pour réaménager le bâtiment et repenser la muséographie.
Le 10 juin 1944, à Oradour-sur-Glane, des soldats de la division SS Das Reich ont rassemblé méthodiquement les habitants puis exécutés les hommes dans les granges avant d’y mettre le feu. Les femmes et les enfants enfermés dans l’église sont assassinés et seule Marguerite Rouffanche parvenait à fuir le brasier, sautant par une fenêtre. Quelques habitants blessés ont également survécu en s’échappant des granges en flammes à l’image de Robert Hébras qui racontera, jusqu’à son dernier souffle, la chronologie de cette journée tragique durant laquelle périrent 643 innocents.
Classé monument historique et conservé en l’état, le village martyr témoigne de la barbarie nazie et incarne encore l’exemple de massacres collectifs de civils par une troupe armée.
Construit il y’a 25 ans, le Centre de la mémoire, permet de transmettre aux visiteurs le récit du massacre et constitue l’un des principaux sites mémoriels en France. Une rénovation est devenue nécessaire pour pouvoir repenser la muséographie et réaménager le bâtiment. Le département de la Haute-Vienne va donc y investir 13 millions d’euros.
Le site fermera ses portes à l’automne 2025 pour réaliser les travaux sur le bâtiment et la nouvelle scénographie sera quant à elle installée à partir de l’été 2026 pour une réouverture en juin 2027.
Une muséographie plus proche d’Oradour
La muséographie de l’exposition permanente totalement repensée a été dévoilée ce jeudi 5 décembre à l’occasion des 25 ans du Centre de la mémoire. Il s’agira de donner aux visiteurs une proximité plus grande avec les habitants et les victimes avec une présentation du village dans la guerre et la vie des villageois avant le 10 juin 1944.
Des objets retrouvés dans les ruines ou confiés par des familles seront alors exposés comme actuellement dans le cadre de l’exposition temporaire « Oradour : Objets en héritage ». Les visiteurs pourront aussi écouter des récits et des témoignages.
Les objectifs de cette nouvelle muséographie sont de :
- valoriser l’enquête pour maintenir l’intérêt du public durant la visite ;
- jalonner le parcours de balises donnant accès aux résultats de recherches historiques, à des questions d’histoire et repères chronologiques ;
- valoriser des approches artistiques ;
- d’inscrire le drame dans une perspective plus large, en valorisant la dimension européenne et suscitant des questionnements sur des drames survenus après.
« Il n’y avait pas d’espaces pour les groupes » indique Babeth Robert la directrice, « un espace sera aménagé pour eux et une deuxième entrée distincte sera créée sur le côté du bâtiment pour apporter plus de confort pour les visiteurs et le personnel. »
La future muséographie sera centrée sur le village avant le massacre pour pouvoir apporter une contextualisation nécessaire au début de la visite. « Dans l’exposition actuelle, on reporte assez loin le contact avec Oradour dans la troisième salle » explique-t-elle, avant de préciser « on entrera beaucoup plus vite en contact avec Oradour car les visiteurs viennent pour découvrir Oradour et son histoire. »
Le projet peut encore évoluer mais, dans les grandes orientations dévoilées ce 5 décembre, il comprend 5 séquences : Oradour-sur-Glane un village limousin, 10 juin 1944 le massacre, enquêtes et procès, paysage mémoriel en mouvement, la portée d’Oradour et la galerie.
La célébration des 25 ans d’ouverture a été l’occasion pour les élus d’insister sur l’importance de ce lieu. « Avec la multiplication des conflits et des guerres, avec la montée des populistes et parfois même leur victoire, le CMO est un bâtiment qui traduit une intention et surtout une certaine idée de notre passé et de notre avenir » a déclaré Jean-Claude Leblois président du Département.
Ce projet a été également salué par Benoît Sadry, président de « l’Association nationale des familles de martyrs », après avoir rappelé la déception des familles lors de l’ouverture du site 1999. « Elles vont vite comprendre que l’exposition permanente n’a pas vocation à s’adresser à eux mais aux visiteurs mais quelques mois plus tard, les familles participaient à la première exposition temporaire qui présentait la vie d’avant à Oradour. » Une façon en quelque sorte de s’approprier l’endroit.
300 000 visiteurs par an
Chaque année, 300 000 visiteurs découvrent Oradour en parcourant les ruines du village martyr et l’exposition permanente pour la moitié d’entre eux. Le Centre de la mémoire et le village martyr demeurent les sites les plus visités en Limousin avec des visites guidées qui permettent de comprendre le massacre. Dès l’ouverture, cet équipement était porteur d’une mission de transmission et d’un message universel et humaniste de vigilance tout en perpétuant la mémoire de ces villageois exécutés le 10 juin 1944.
Cet équipement scientifique et culturel est désormais un lieu incontournable pour les élèves du CM1 à la terminale Les élèves et leurs professeurs bénéficient d’un accompagnement adapté aux programmes scolaires avec visites guidées et ateliers thématiques. Quelques 30 000 scolaires sont accueillis tous les ans. Durant les travaux, les actions scientifiques et culturelles se poursuivront de même que les visites guidées, ateliers et activités hors les murs ainsi que les projets éducatifs des scolaires.
2024 année de commémoration
L’année qui s’achève coïncidant avec les 80 ans du massacre a été marquée par plusieurs événements. Un requiem a été créé en hommage aux victimes fruit d’un partenariat entre le Centre de la mémoire, le Conservatoire de Limoges et Michel Bosc qui a composé une œuvre originale interprétée à quatre reprises et d’abord devant les familles de victimes.
De plus, le projet pluridisciplinaire « Ruines » a été mené sur « Les usages politiques et sociaux des ruines de guerre du XVIe à nos jours, entre résilience, commémoration et patrimoine » grâce à un financement de l’Agence nationale de la recherche et coordonné par Stéphane Michonneau, professeur d’histoire contemporaine à l’Université de Paris Est Créteil.
Enfin, un colloque international dédié aux villages martyrs en Europe, s’est déroulé du 22 au 24 mai au Centre et à Limoges dans le cadre de « Ruines ».
Pour ses 25 ans, le Centre de la mémoire propose, ce 7 décembre 2024, des visites guidées gratuites de l’exposition permanente et des lectures théâtralisées des cahiers de Denise Bardet, l’institutrice du village.
Plus d’informations sur le site du Centre de la Mémoire : oradour.org