L’annonce de la fermeture de 28 classes dans le 1er degré en Haute-Vienne pour la rentrée prochaine a déclenché la colère dans bons nombres de villages qui voient, chaque année, la situation se répéter aux détriments des enfants. Lundi 20 Février, les parents d’élèves, élus et syndicats ont organisé des manifestations locales puis se sont rassemblés devant la préfecture de Limoges.
Chaque année, les écoles des zones rurales doivent faire face à une problématique de taille : la menace de fermeture d’une de leur classe. Chaque année, ces décisions mettent en péril le maintien de l’apprentissage scolaire dans de bonnes conditions, contribuent au déclin des installations des familles en campagne et empêchent parfois même le maintien de certains professeurs des écoles en place. Ce lundi 20 février au matin, bon nombre d’écoles du Nord de la Haute-Vienne se mobilisaient pour dire stop aux fermetures de classes, les associations de parents d’élèves disent STOP et manifestent leur ras-le-bol général.
Une épée de Damoclès constante
Pour certains, comme sur la commune de Chamboret, on en a ras le bol. En effet, ils s’étaient mobilisés contre la fermeture d’une classe l’année dernière à la même époque : les membres de l’association des parents d’élèves, élus, familles et habitants de Chamborêt, et avaient eu gain de cause. L’année 2023 à peine commencée et tout ce petit monde apprend qu’une nouvelle fois, une classe du RPI (regroupement pédagogique intercommunal) Chamborêt-Vaulry est menacée de fermeture.
Mais ce ne sont pas les seuls ; 28 classes de la Haute-Vienne ont eu leur annonce de possible fermeture ; de quoi faire hurler. Ecoles de Châteauponsac, Bessines-sur-Gartempe, Arnac-la-Poste, Saint-Jouvent, personne n’est épargné et c’est pourquoi en ce lundi 20 février au matin pas moins de sept écoles du territoire étaient mobilisées pour dire STOP à la menace constante de fermeture de classe.
Un climat insécure
« Pour le moment rien n’est entériné, mais il nous semble nécessaire que nous fassions à minima un courrier à l’Inspectrice d’académie afin de lui exposer notre point de vue sur cette fermeture de classe qui est, une fois de plus, totalement incohérente avec le terrain-effectifs en hausse sur le RPI, déstabilisation de toute notre équipe pédagogique avec la perte d’une de nos enseignantes, investissement réalisé pour la 3ème classe de Vaulry malgré les difficultés financières de la commune, nouveaux jeunes habitants dans nos communes » nous expliquait Aurélie Carer Ducourtieux, représentante des parents d’élèves, en tout début de mois.
Et de rajouter : « Il est à noter également qu’avec une fermeture de classe, nos écoles ne seraient plus en capacité d’accueillir les TPS (très petite section) qui ont moins de trois ans. Ceux-ci seront donc inscrits dans d’autres écoles du secteur, mais ne reviendrons sûrement pas ensuite sur le RPI (regroupement pédagogique intercommunal) pour la suite de leur scolarité et cela risque de mettre en péril l’avenir de nos deux écoles ». Et de souligner qu’au-delà du RPI ce sont 28 fermetures de classes de prévues dans le premier degré en Haute-Vienne et 11 suppressions de postes à l’étude. Et à priori aucun moyen supplémentaire sur la brigade de remplacement.
« A l’heure où l’on nous parle d’école inclusive, de dédoublement de certains niveaux ces fermetures sont totalement inacceptables, car absolument en décalage avec la situation que nos enseignants et nos enfants vivent sur le terrain » rajoutent les représentants des parents d’élèves. Un courrier adressé à l’académie est donc parti début février, afin d’essayer une fois de plus de sauver une classe et l’avenir de toutes ces écoles en milieu rural. Mais cela ne suffit pas.
« Nos écoles ne sont pas une simple gymnastique comptable »
A 14 heures, mobilisation du Collectif des parents de Haute-Vienne et de toutes les associations des parents d’élèves devant la préfecture de Limoges. Jany Claude Solis, maire de la commune de Saint-Jouvent prend le micro et se fait porte-parole du ras le bol général : « On est tous là pour dire ça suffit. Il faut qu’on travaille autrement avec l’éducation nationale ; nos écoles ne doivent pas subir une simple gymnastique comptable. Il faut effectivement qu’il y ait des projets éducatifs. Par exemple moi j’ai choisi de continuer à travailler avec l’école sur une semaine à quatre jours et demi – ce qui est la norme mais pas dérogatoire puisque l’on dit effectivement que le rythme scolaire pour les enfants, c’est mieux sur quatre jours et demi que sur quatre. Mais on n’en tient pas compte ; donc à quoi ça sert ? Alors que ça coûte plus cher aux communes de maintenir ce choix, qu’il faut mettre en place une garderie le mercredi etc… ».
Et Jany Claude Solis de poursuivre : « Je pense que nous n’avons pas vraiment de dialogue avec l’académie ; on fait partie des «fléchés» et on nous dit : « ce n’est pas encore sûr, ce n’est pas certain (en parlant des fermetures de classes). C’est donc déjà mal partie. Nous les communes des zones rurales, on essaie de fournir toutes les informations en notre possession pour maintenir ouvertes ces classes : les décès, les naissances, l’arrivée de nouveaux habitants ; mais aujourd’hui le monde bouge, les gens bougent et il est compliqué de fournir des chiffres en assurant leur stabilité ».
Boycott et report du « conseil départemental de l’éducation nationale »
Après cette forte mobilisation, Alice Lebraud Présidente de l’association de parents d’élèves du RPI Vaulry-Chamborêt demande à tous de rester mobiliser et de maintenir « la pression » toute cette semaine, les décisionnaires maintenant leur décision de fermeture pour l’instant.
Une pétition circule déjà en ligne. A noter la présence de Fabrice Escure, représentant Jean-Claude Leblois, Président du Conseil Départemental aux côtés des parents d’élèves, ce lundi à Limoges pour se mobiliser contre les fermetures de classes prévues dans la carte scolaire 2023-2024. « Nous demandons à l’État d’allouer les moyens nécessaires pour assurer un enseignement de qualité sur l’ensemble de la Haute-Vienne ».
La mobilisation devant la préfecture de Limoges aura fait du bruit. En effet, le Collectif des parents d’élèves de la Haute-Vienne, soutenu par de nombreux élus (maires des communes), des syndicats et des parlementaires auront permis à tous de s’exprimer dans la rue. « Nos enfants ne sont pas des moutons, arrêtez de les compter » est un slogan qui aura été clamé haut et fort.
Entendu pour autant ? Pas si sûr ; la réunion qui devait se tenir en ce lundi par le CDEN (conseil départemental de l’éducation nationale) pour entériner la carte scolaire 2023-2024 a été boycottée par les manifestants et doit être reportée vendredi ou lundi prochain. Affaire à suivre.