NDLR : cet article est paru le 1er avril et il s’agit bien sûr d’un « poisson d’avril »
C’est peut-être un détail pour vous, mais pour les usagers habituels du POLT ça veut dire beaucoup ! Hier soir, l’équipe de l’Intercités a réalisé un « petit exploit » en se présentant à la gare de Bénédictins avec… 10 minutes d’avance !
Délaissée par la direction de la SNCF et par l’État depuis de nombreuses années, la ligne POLT a fait couler beaucoup d’encre ces derniers mois jusqu’à ce que le PDG de la SNCF et le ministre des Transports se décident enfin à venir en visite à Limoges et à mobiliser quelques précieux deniers pour rénover une ligne qui, à contre-courant du mouvement global de TGV-ification de la France, devenait de plus en plus lente. Les travaux de modernisation de la ligne devraient encore prendre plusieurs années mais à Limoges, l’espoir renait pour retrouver, un jour peut-être, un train aussi fiable et rapide que dans les années 70-80.
C’est donc porté par cet élan d’optimisme que le personnel de l’Intercités du vendredi 31 Mars, départ d’Austerlitz 17h41, avait décidé de faire une petite surprise à ses voyageurs. « On s’est rendu compte que la majorité des passagers allaient à Limoges et qu’on aurait seulement 14 descentes et 8 montées entre Austerlitz et les Bénédictins. Avec les rafales de nord-ouest annoncées pendant toute la soirée, les conditions étaient optimales » nous a confié Hervé Loce, conducteur de train Intercités et natif de Limoges.
Après avoir prévenu les voyageurs qui devaient monter à Vierzon et à Châteauroux de ne surtout pas être en retard, l’ensemble de l’équipe a minutieusement préparé son coup : « On a aussi demandé aux collègues en charge des passages à niveau d’être sur le qui-vive parce que lorsqu’on se lance dans ce genre de tentative chaque seconde est précieuse » explique Julie Placé, responsable de l’équipe de bord.
2 minutes d’avance à Vierzon, 6 à Châteauroux…
Profitant d’un trafic moins dense qu’à l’accoutumée en raison des mouvements sociaux, le conducteur de l’Intercités avait ajusté sa feuille de route pour gagner progressivement du temps sur les différents tronçons. L’arrivée avec 2 minutes d’avance à Vierzon a validé la faisabilité du plan et lancé l’équipe dans une véritable course contre-la-montre. « Il est toujours compliqué de sortir de Paris le vendredi soir, les RER empruntent les mêmes axes que nous et c’est souvent l’embouteillage […] hier, aucun RER ne circulait en même temps que nous et on a donc pu partir sur les chapeaux-de-roues tout en faisant bien attention à la sécurité sur cette portion de réseau très dense« .
Les 6 voyageurs descendant à Vierzon ont été discrètement prévenus de se préparer à une descente rapide plusieurs minutes avant l’entrée en gare et, arrivé avec 2 minutes 16 secondes d’avance à Vierzon, l’Intercités repartait de plus belle seulement 28 secondes plus tard. Sur le tronçon entre Vierzon et Châteauroux, le train a ensuite pu maintenir une très haute vitesse de croisière grappillant seconde après seconde sur l’horaire théorique. « Sur cette portion, la ligne est bonne, c’est tout droit et avec le vent de 3/4 ça filait ! C’est assez grisant quand on est au volant d’une machine qui roule bien sur un réseau fiable » avouait Hervé Loce.
A Châteauroux, c’est un autre petit exploit collectif qui a été réalisé avec la complicité des passagers. « C’était essentiellement des étudiants qui redescendaient en famille pour le week-end, on les a mis dans la confidence et ils ont vraiment été au top » sourit Julie Placé. Prêts avec plusieurs minutes d’avance et sur-motivés, les 8 jeunes castelroussins ont presque sauté du train en marche. « On a quand même marqué l’arrêt, c’est obligatoire mais c’était plutôt une sorte de touch-and-go, ça n’a pris que 19 secondes parce que les collègues de la gare de Châteauroux avaient aussi bien briefé ceux qui montaient. »
10 minutes d’avance à Limoges, des voyageurs qui n’en croient pas leurs yeux
Avec 6 minutes d’avance au départ de Châteauroux, la belle histoire aurait pu s’arrêter là mais « on avait vraiment envie de franchir la barre symbolique des 10 minutes, pour marquer le début d’une nouvelle ère pour la ligne POLT. C’est vraiment dur de voir défiler les voyageurs mécontents quand ils descendent de ton train, on avait envie de voir des grands sourires pour une fois » témoigne un peu ému Hervé Loce.
Profitant du fait qu’aucun voyageur ne souhaitait faire un arrêt à Argenton-sur-Creuse ou la Souterraine en ce vendredi soir de giboulées, toute l’équipe de l’Intercités est restée concentrée sur son objectif final. « On a ralenti à 10 km/h dans les gares d’Argenton et de la Sout’ mais on n’avait aucune obligation de s’arrêter vu les circonstances » explique Julie Placé. Il ne restait alors qu’une cinquantaine de kilomètres à parcourir pour valider l’exploit sur un tronçon que Hervé Loce connait comme sa poche : « Mes grands-parents maternels sont de la Souterraine, j’ai fait le trajet des dizaines de fois quand j’étais gamin et des centaines de fois depuis que je suis conducteur. Hier soir, avec les rafales qui nous relançaient après chaque courbe, on a vraiment pu faire la course parfaite. »
Comme dans un rêve, l’Intercités est entré en gare de Limoges Bénédictins à 20h50 et 23 secondes soit 10 minutes et 37 secondes d’avance sur l’horaire prévu. Une performance presque incroyable pour des passagers que l’on a vu descendre un peu hagards des wagons. « Ça fait des mois que je prends des retards de plusieurs heures à cause du givre ou d’un problème d’entretien qui nous immobilise de manière indéterminée en gare des Aubrais ou en pleine voie, alors un trajet qui se déroule sans accroc c’est déjà beau mais là je n’arrive pas à y croire » confiait l’un, « Mon grand-père m’a dit qu’il avait déjà mis moins de 3 heures pour faire Paris-Limoges, mais je pensais que c’était encore une blague de Pépé » confiait l’autre…
10 minutes c’est peut-être un détail pour vous, mais pour l’équipe et les voyageurs du train Intercités, hier soir ça voulait dire que l’espoir est encore possible…