Chaque semaine, deux camions transportant chacun une IRM mobile sillonnent les routes du Limousin. Le but de cette mission orchestrée par le « GIE – GML » : rendre possible la mutualisation d’un équipement coûteux mais essentiel pour la population. Nous sommes monté à bord de ce véhicule ô combien précieux en zone rurale.
Nous sommes à l’arrière du Centre hospitalier d’Ussel. C’est ici que prend place, quatre jours par semaine, l’IRM (Imagerie par résonance magnétique) mobile du « GIE des radiologues du Limousin » baptisé « Groupement d’Imagerie Médicale du Limousin » (GIE – GML). Le 5ème jour, le véhicule est à Aubusson. De l’extérieur, le semi-remorque accolé au bâtiment du Centre hospitalier d’Ussel aurait presque des airs d’aéroport, avec sa passerelle, comme un couloir d’embarquement médical.

Avant de monter découvrir le fonctionnement de cette machine ambulante, Céline Tricard, la directrice du « GIE – GML » introduit : « Le GIE est une structure privée dans laquelle il y a des partenaires publics et des partenaires privés. » Ces derniers sont les Centres hospitaliers de Guéret, d’Aubusson, Ussel, Saint-Yrieix-le-Déjalat et Saint-Junien, ainsi qu’un groupement de praticiens libéraux en imagerie médicale (SELARL IMRO de Limoges). « Nous avons deux IRM mobiles(*), une pour Ussel-Aubusson et une autre pour Saint-Yrieix-la-Perche et Saint-Junien. »
Dans le détail de l’organisation des semaines, l’équipement est partagé entre le privé et le public. Par exemple, pour celle qui vient à Ussel et Aubusson : deux jours par semaine sont gérés de manière privée par la Selarl IMRO, deux jours gérés par l’hôpital d’Ussel. Le jour à Aubusson est assuré par le centre hospitalier d’Aubusson.
À Ussel, cela fait plus de vingt ans que cette IRM mobile vient s’installer devant le bâtiment de l’hôpital qui avait été aménagé en conséquence. « La première IRM mobile est arrivée à Ussel en 2001 », relate la directrice, « une IRM coûte extrêmement cher. La plupart des centres hospitaliers ont des besoins, donc l’idée est de mutualiser les équipements sur plusieurs sites. C’est le camion qui vient au patient. » Le GIE est bien sûr soumis aux autorisations de l’Agence régionale de santé puisqu’il s’agit d’un équipement dit « lourd ».

Dans les couloirs du centre hospitalier d’Ussel, nous suivons les panneaux « IRM » qui nous mènent vers une première salle, le secrétariat. Stéphanie Granjoux et Virginie Gauthier sont les deux manipulatrices en électroradiologie présentes ce jour-là. Nous sommes une jour où les vacations sont privées. « Ca fait vingt ans que je suis dans ce camion ! », sourit Stéphanie Granjoux. Plusieurs types de personnels travaillent dans cet engin comme l’explique Céline Tricard : « Soit ce sont les manipulateurs des centres hospitaliers où est installé le véhicule ou soit les 11 manipulateurs du GIE. Les radiologues sont en distanciel ou en présentiel, et sur les journées assurées par les centres hospitaliers, ces derniers ont leurs médecins sur place la plupart du temps. »
Le camion arrive dans la nuit, transporté par des chauffeurs privés qui se chargent de tout mettre de niveau et de stabiliser l’ensemble. Un travail de précision, d’autant que l’IRM fonctionne en permanence et utilise l’hélium sous forme liquide pour maintenir son aimant à très basse température. Bien sûr, le véhicule est équipé d’une cage de Faraday (une enceinte métallique qui bloque les ondes électromagnétiques, pour protèger l’IRM des interférences extérieures et empêcher ses propres ondes de perturber l’environnement).
Dans la petite salle de contrôle, Stéphanie et Virginie travaillent comme dans une salle classique, à un détail près. « Tout est attaché, les écrans sont fixés, on a la carte grise dans les placards au-dessus des écrans … Je dirai qu’en tant que manipulatrice radio, on est un petit peu plus technicienne que nos collègues classiques », résume-t-elle, tout en installant une patiente sur la table d’examen.

Les patients justement, voient-ils la différence ? « Oui, à Ussel ils se rendent comptent qu’ils montent dans un camion, il y a des sites où c’est moins flagrant. D’ailleurs on peut aussi monter les patients allongés en brancard, on a le brancard amagnétique juste en bas », poursuit la professionnelle de santé qui admet : « On est encore plus confrontés à des phénomènes de claustrophobie ici. Le patient est enfermé dans un tunnel dans un camion ! »

Côté examen, tous sont réalisés comme dans une IRM classique, sauf la cardiologie car le matériel annexe serait trop encombrant. On y détecte les cancers, on explore le système nerveux, on analyse les articulations … « Pas plus tard que ce matin, on a fait un AVC en urgence », ajoutent les professionnelles. D’une puissance d’1,5 Tesla, l’IRM correspond à une machine d’imagerie « classique », même s’il en existe des 3 Tesla. « Le camion ne pourrait pas supporter un tel poids », complète Stéphanie.
Sur une journée, une vingtaine de patients passent dans ce tunnel. « On a un programme à l’année. Je travaille de 9 heures à 16 heures quand je viens ici et il n’y a pas de dépassement d’honoraires », décrit la docteur radiologue Françoise Forel qui assure les vacations privées ce jour-là.
Le camion passera la nuit ici, au pied du bâtiment du centre hospitalier d’Ussel avant de commencer une nouvelle journée, comme depuis plus de vingt ans, au plus près des patients des zones rurales, trop souvent parfois isolés médicalement…
(*) Outre ces deux IRM mobiles, le GIE – GIML possède également le scanner de Saint-Junien, l’IRM de Guéret partagé avec l’hôpital et un second scanner autorisé à Guéret.