Depuis mardi 16 décembre, les agriculteurs se mobilisent dans le Limousin, comme partout en France, pour dénoncer la politique sanitaire de lutte contre la dermatose nodulaire. En Corrèze, la mobilisation est importante. Depuis trois jours maintenant, entre autres actions, les paysans bloquent l’autoroute A20 et l’A89. Nous sommes allés les rencontrer.
Plus aucun véhicule ne circule sur cette portion de l’autoroute A89. Nous sommes entre les sorties 23 (Ussel-Ouest) et 24 (Ussel-Est). Ici habituellement, des centaines et des centaines de camions et voitures tracent leur route vers Clermont-Ferrand ou Bordeaux. Mais depuis ce mardi 16 décembre 14 heures, c’est le calme plat. Ou presque. Une dizaine de tracteurs et leurs bottes de pailles ont pris possession des lieux.
« On restera ici tant qu’il le faudra » prévient un agriculteur, venu du Cantal voisin, devant un tracteur où est écrit « Stop à l’abattage ». L’abattage, c’est le mot qui a cristallisé les colères de ces derniers jours. Si les agriculteurs sont sur les routes, c’est parce qu’ils dénoncent la politique sanitaire mises en place pour lutter contre l’épidémie de dermatose nodulaire : une maladie virale qui touche les bovins, provoquant de la fièvre, des nodules sur la peau, une baisse de production et parfois la mort. Très contagieuse, elle est transmise surtout par des insectes piqueurs.
Sur le barrage, Laurent Guillaume, secrétaire du comité départemental de la Corrèze de la Confédération paysanne, nous explique : « Ce rassemblement, c’est pour essayer d’informer la population et de rappeler les quatre points que l’on demande : l’arrêt de l’abattage total, une vaccination élargie, le déclassement de la maladie au niveau européen et une réunion avec les administrations. » Fabien Marcilloux, président du syndicat du Modef ajoute : « Aujourd’hui, c’est catastrophique pour les éleveurs. »

Des bouchons et des routes secondaires engorgées
Depuis mardi, ils sont donc là, sur cette portion d’autoroute et sur le rond-point à l’entrée du péage, et ne comptent pas bouger. Ce mercredi 17 décembre après-midi, les manifestants ont reçu la visite d’un certain Patrick Sébastien. Et Philippe Brugère, représentant le député François Hollande, s’est également rendu sur place : « On soutient la position des éleveurs, il faut un abattage sélectif et une vaccination autour des foyers. ».
Sur le blocage de l’A89 comme sur celui de l’A20 au sud de Brive, les revendications sont les mêmes ; les conséquences aussi. Sur les routes secondaires, les bouchons s’étendent. La ville d’Ussel est saturée sur plusieurs kilomètres, le trafic s’y écoule au compte-goutte. « Cette journée de manifestation a mobilisé plus de 50 militaires de la gendarmerie nationale et une dizaine d’agents du conseil départemental. Au plus fort de la journée environ 15km de bouchons sur l’A20 au sud de Noailles », écrivait ce mercredi 17 décembre la Préfecture de la Corrèze qui conseille « d’éviter ces secteurs, de reporter les déplacements non nécessaires, d’adapter sa vitesse et d’actionner ses feux de détresse en arrivant à l’arrière d’un ralentissement, de suivre les déviations mises en place par les autorités et non les déviations préconisées par les GPS qui amènent dans les centres bourgs particulièrement pour les poids lourds ».
Une situation compliquée qui devrait continuer en cette fin de semaine, alors que le trafic s’annonce dense avec les vacances scolaires de fin d’année qui commencent demain soir… Alors que les guirlandes s’allument, que les listes de cadeaux se bouclent et que les routes devraient mener vers les retrouvailles familiales, d’autres restent immobiles, campés sur l’asphalte. En cette fin d’année, on assiste à une image contrastée : celle d’éleveurs, pourtant « d’obédiences » souvent opposées, qui demandent d’une seule voix à ne pas être sacrifiés au nom d’une politique sanitaire qu’ils jugent aveugle. Entre l’envie de rejoindre les fêtes et le soutien populaire pour ceux qui nourrissent le pays, le temps des réveillons se heurte cette année au temps de la colère agricole…

