Sur le Plateau de Millevaches : la sève de bouleau, l’autre source qui coule à flots

Avec l’arrivée des beaux jours, c’est aussi le retour d’une pratique qui fait de plus en plus d’adeptes : les cures de sève de bouleau. A la Ferme de Fardissou, à Saint-Genest-sur-Roselle (Haute-Vienne), on en récolte depuis plus de 10 ans. Rencontre. 

Le métier peu connu de « bétuliculteur »

Sur le Plateau de Millevaches, en ce tout début de printemps, la nature commence à sortir de l’hiver. Les jonquilles pointent le bout de leur nez après les dernières neiges. Les sols commencent doucement à se réchauffer et dans les forêts, la vie reprend. Pour Patricia Mingotaud et son mari Gérard Dégot, c’est le même rituel, chaque matin en cette période.

Le couple quitte la Ferme de Fardissou à Saint-Genest-sur-Roselle, au sud-est de Limoges, pour rejoindre les forêts du Plateau dès l’aube, à la recherche d’un précieux liquide. « On est récoltant de sève de bouleau depuis 2014 à Eymoutiers et on s’est installés en ferme biologique à Saint-Genest en 2018 », commence Patricia, qui est devenue une bétuliculteuse (« celle qui cultive des bouleaux« ) après s’être longtemps passionnée pour les plantes médicinales et aromatiques.

Dans les forêts privées (avec lesquelles la Ferme a des partenariats), Patricia vient percer un petit trou dans les premiers centimètres d’écorces de l’arbre, à un mètre de hauteur environ. « Ensuite, je mets un tuyau alimentaire relié à un bidon », décrit-elle. La sève commence alors à couler, goutte à goutte. « En raison du choc thermique du matin, la montée de sève est plus importante. » explique-t-elle.

Un bouleau, un tuyau, un bidon… et le tour est joué ! © Stéphane Rayat – Ferme de Fardissou

Entre un et cinq litres se sève peuvent couler de chaque bouleau en cette période. « Cela devrait continuer jusqu’à début avril en fonction des zones de récolte. On a deux zones à des altitudes différentes donc quand l’une va s’arrêter, l’autre va commencer », précise l’agricultrice qui a aussi planté des bouleaux à Saint-Genest. « Ils produiront d’ici une dizaine d’années. »

La récolte matinale est ensuite rapportée à la ferme pour être stocker au frais. C’est l’étape de la mise en bouteille si l’on peut dire. « On met la sève en bib (équivalent du cubis de vin) de 3 ou 5 litres pour le format cure », explique la productrice. La sève fraîche devra ensuite être consommée rapidement.

Des cures de trois semaines

Patricia a suivi une formation d’herboriste à l’école des Plantes à Paris, et nous explique les bienfaits de cette sève de bouleau : « C’est un draineur, ça permet de redonner au corps sa fonction d’élimination naturelle. Elle libère les toxines et draine le foie, les intestins et les articulations. Il y a d’autres plantes médicinales qui sont drainantes mais la sève de bouleau draine vraiment là où il y a besoin. Les effets positifs peuvent être ressentis dès les trois semaines, mais ils sont différents sur chaque personne. »

Les minéraux qui composent cette sève sont nombreux : calcium, potassium, phosphore, magnésium, manganèse, zinc, fer, sélénium, acide citrique, acide lactique… Des principes actifs et des oligo-éléments qui apportent de la vitalité et de l’énergie, selon la Ferme de Fardissou.

La sève de bouleau permet donc de faire une « cure de détox » après l’hiver pour pouvoir profiter pleinement du printemps. Patricia préconise un cure d’une durée de 3 semaines, à raison d’un verre tous les matins à jeun. « La base recommandée par jour, c’est 15 centilitres et 25 centilitres pour les personnes qui se sentent plus fatiguées, qui ont eu un hiver compliqué. »

Environ 2.000 litres sont vendus frais chaque année à Saint-Genest. Le reste est pasteurisé ou sert à la production de cosmétique, une autre activité de la Ferme : la marque « Bulle de sève » (lait pour le corps, crème de jour, crème de nuit, pour les mains, gel douche …)

La sève de bouleau, une pratique ancrée dans les cultures nordiques

Contrairement aux feuilles ou à l’écorce, la sève du bouleau n’est pas inscrite sur la liste A de la pharmacopée française. Pourtant, dès le Moyen-Âge, des médecins et des apothicaires se sont accordés sur ses propriétés drainantes et recommandent l’eau de bouleau pour traiter les ulcères, éliminer les calculs rénaux, soulager les douleurs articulaires ou renforcer le système immunitaire.

Planche botanique « betula pendula » du Prof. Dr. Otto Wilhelm © domaine public via Wikipedia

« Au Canada et dans les pays de l’est, c’est vraiment ancrée dans leur culture. Ils parlent de boisson nourricière » raconte la productrice. Dans ces régions où les bouleaux sont légions, l’eau de bouleau était traditionnellement consommée par les peuples nordiques et celtiques au printemps. Portée par les tendances « bien-être et détox », cette pratique a franchi les frontières et fait, ces dernières années, de plus en plus d’adeptes dans l’Hexagone.

Pour plus d’informations sur la ferme de Fardissou, rendez-vous sur lafermedefardissou.bio

Jérémy Truant
Jérémy Truant
Journaliste Actus Limousin
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