La présentation des mesures de réduction du déficit de l’État prévues dans le projet de loi de finances 2025 a fait sauter au plafond les élus locaux de tous bords. La raison ? 450 collectivités vont se voir retirer 5 milliards d’euros de recettes pour participer à un désendettement qui n’est pas le leur. Ville, département ou région, l’addition est salée et devrait sérieusement impacter la fin des mandats en cours…
Depuis le milieu des années 1970, la dette publique française se creuse inexorablement et de manière exponentielle. Des 724 milliards d’euros du début de l’an 2000 (= 60.5 % du PIB), elle est désormais estimée à plus de 3220 milliards d’euros (soit 112% du PIB). Si l’économie de notre pays est complexe, le mécanisme derrière cet endettement croissant est pourtant simple : depuis 1975, et peu importe les forces politiques à la tête du pays, les recettes ont toujours été inférieures aux dépenses, contraignant l’État à recourir aux emprunts. Le « petit problème » c’est que sans ce fameux retour de la croissance, chimère économique, l’intérêt des emprunts continuent de creuser la dette…
Et si la crise Covid et le fameux « quoi qu’il en coute » ont bien sûr accentué la dégradation, le mal est plus profond puisque la différence entre ce qui entre et ce qui sort des caisses de l’État est de l’ordre 5% du PIB en moyenne sur les 15 dernières années. Ni l’arrivée à la tête de l’État d’un ancien ministre de l’économie, ni le maintien en poste de Bruno Lemaire dans cinq gouvernements successifs et pendant 7 années n’y auront rien changé…
Le « coup de rabot » annoncé du nouveau gouvernement
Après une période de flottement démocratique inédite dans l’Hexagone au XXIème siècle, le nouveau gouvernement de Michel Barnier a donc décidé de s’attaquer à cette fameuse dette et engager une période d’austérité de redressement qui vise à ramener le déficit à 5% du PIB en 2025 et à moins de 3% en 2029. Objectif : respecter les nouvelles règles européennes en vigueur depuis avril 2024 et rassurer les agences de notations dont les notes impactent les taux d’intérêt des emprunts.
Pour y parvenir, le nouveau gouvernement a élaboré un projet de loi des finances (PLF) et un projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 qui visent à permettre 60 milliards d’euros d’économie par rapport aux prévisions dont 40 milliards de réduction des dépenses publiques par rapport à 2024. Et s’il va demander un effort fiscal ponctuel aux ménages et aux entreprises les plus riches, l’essentiel de l’effort va être supporté par l’État, ses opérateurs, les administrations de sécurité et une partie des collectivités territoriales.
L’examen du projet de loi des finances 2025 commencera en début de semaine prochaine à l’Assemblée Nationale avec, à partir du 21 octobre, l’examen de la première partie consacrée aux recettes, et à partir du 5 novembre, l’examen de la seconde partie dédiée aux dépenses.
Impacts sur les collectivités territoriales en Limousin
Pour comprendre comment une partie des mesures proposées dans le « PLF 2025 » vont avoir un impact sur les collectivités territoriales, il faut savoir que l’État transfère une partie de ses compétences aux collectivités locales et leur attribue en contrepartie d’une partie des recettes fiscales sous la forme de « dotation globale de fonctionnement ». Pour connaitre le détail des ressources des collectivités territoriales, rendez-vous sur le site vie-publique.fr.
Or le « projet de loi des finances » présenté par le gouvernement de Michel Barnier prévoit la participation des collectivités territoriales à l’effort financier de redressement à hauteur de 5 milliards d’euros via différentes mesures comme la baisse du fond de compensation pour la TVA (FCTVA) qui représente la principale aide de l’État à l’investissement des collectivités, la perte d’une partie de la TVA revenant aux collectivités ou la mise en place d’un « mécanisme de précaution » qui mettrait en réserve 2% des recettes de fonctionnements de quelques 450 collectivités dont les dépenses de fonctionnement au budget principal sont supérieures à 40 millions d’euros .
L’association « Intercommunalités de France » a évalué les montants de cette « ponction » de 2% qui impactera directement sur les recettes des collectivités territoriales concernées en 2025. Elles devraient représenter pour celles-ci une « perte directe » de 3 milliards d’euros.
Les collectivités concernées par cette « mise en réserve de 2% » sur notre territoire :
- ville de Brive-la-Gaillarde : -1.7 M€
- ville de Limoges : -3.9 M€
- CA du Bassin de Brive : -1.2 M€
- CA de Limoges Métropole : -2.6 M€
- Département de la Corrèze : -6.7 M€
- Département de la Haute-Vienne : -8.8 M€
- Région Nouvelle-Aquitaine : -49.2 M€
En cumulant les trois mesures qui les concernent, l’addition sera même bien plus salée pour les collectivités concernées puisqu’elle s’élève par exemple à 8.5 M€ pour la Ville de Limoges, 12 M€ pour le département de la Haute-Vienne et 126 M€ pour la Région Nouvelle-Aquitaine. Les élus locaux de tous bords sont « vent-debout » contre ces mesures jugées injustes et qui vont sérieusement impacter des finances fragilisées par l’inflation et le coût croissant des nouvelles compétences qui leur ont été transférées depuis 20 ans.
D’autant que l’argent investi par les collectivités « ruissellent » normalement sur l’économie locale et que certains secteurs d’activités pourraient souffrir fortement de cet arrêt soudain de la commande publique et être contrainte de réduire leurs effectifs. En mettant à mal les finances des collectivités territoriales pour désendetter l’État, il y a encore fort à parier que les solutions d’aujourd’hui vont créer les problèmes de demain…
Pour consulter l’ensemble des informations sur le projet de loi des finances 2025, rendez-vous sur le site du ministère de l’économie.