A ESTER, le chantier exemplaire d’un futur espace d’innovation qui fait la part belle au bois et à la paille hachée

Après le centre de loisirs d’Uzurat en construction près du lac, la paille hachée est à nouveau employée pour isoler les murs du futur « Espace d’innovation électronique hyperfréquence et photonique » qui sort de terre sur le parc ESTER Technopole. Une réalisation vertueuse qui vise à inspirer des maîtres d’ouvrage…

La paille hachée a décidément le vent en poupe dans l’agglomération limougeaude, et ça ne devrait pas s’arrêter de sitôt ! Car à l’occasion de la visite organisée sur le chantier du centre de ressources « électronique hyperfréquence et photonique, des architectes et des maîtres d’ouvrage pionniers ont pu découvrir un matériau isolant naturel, renouvelable et facilement mobilisable pour remplir les parois en ossature bois de ce bâtiment.

Avec une densité de 110 kg/m3, la paille hachée est isolante et deux fois plus résistante qu’une lame de bois ! © Corinne Mérigaud

Et il en faudra 22 tonnes fournies par la coopérative Iélo. Créée en 2021, son atelier est basé près de Poitiers. « Elle travaille en circuit-court et en local avec des agriculteurs partenaires qui produisent la paille de blé » explique Nathalie Samson coordinatrice régionale de Résonance Paille, qui promeut toutes les techniques de construction à base de paille, « nous sensibilisons les architectes du territoire et rassurons les maîtres d‘ouvrage. Nous accompagnons le premier projet de A à Z. La paille permet d’arriver à un excellent confort acoustique, thermique et sanitaire particulièrement l’été. Ce matériau performant permet de construire des bâtiments vertueux et durables.»

La paille achetée par Iélo est en surproduction, ce qui garantit aux agriculteurs un nouveau débouché et un revenu complémentaire. « La botte est achetée 3,50 à 4 € hors taxes » précise-t-elle.

Un chantier exemplaire

Il faut vite oublier la maison des trois petits cochons, référence erronée pour les maisons en paille ou en bois. Les techniques employées aujourd’hui garantissent des bâtiments qui vont tenir dans le temps et ne pas tomber dès la première tempête. « La paille est insufflée dans les ossatures dans l’atelier de l’entreprise Guillaumie à Aixe-sur-Vienne, ce qui donne une intensité très forte, deux fois plus dur qu’une lame de bois » annonce Nicolas Balmy architecte, « elle est soufflée dans les murs avec une machine d’insufflation. La densité est de 110kg/m3. » Autant dire qu’un foyer d‘incendie ne pourrait pas s’y développer et si le feu prenait, il ne pourrait pas se propager car sa résistance est supérieure au parpaing et à l’acier. La paille empêche l’oxygène de circuler donc la combustion n’est pas possible. Le grand méchant loup a du souci à se faire…

L’architecte Nicolas Balmy du cabinet limougeaud Spirale, retenu après appel d’offre, l’aura répété plusieurs fois au cours de la visite de chantier. «C’est propre et ce n’est pas parce que vous êtes là. Vous seriez venus hier, cela aurait été pareil. Ce chantier est exemplaire, réalisé par des entreprises performantes. Il est aussi expérimental avec cette technique spectaculaire de bois paille. Un gros travail a été mené avec les services d’incendie et de secours pour voir la façon dont ils interviendraient sur ce bâtiment. Le chantier a une semaine d’avance, c’est rare ! »

Un chantier propre et avec une semaine d’avance, c’est rare ! © Corinne Mérigaud

Signature d’un Pacte Bois biosourcé

Le constructeur Guillaumie a fabriqué les murs extérieurs, les planchers et la charpente, en épicéa d’origine française, dans ses ateliers. Ses équipes vont poser le bardage en Douglas traité pré-grisé. Les murs sont entièrement préfabriqués et livrés prêts à poser sur chantier, ce qui réduit le temps de montage .

Un bardage en douglas viendra recouvrir l’ensemble de l’extérieur du bâtiment © Corinne Mérigaud

« Cela a été très vite pour un bâtiment de cette taille » reconnaît Fabien Gaumy, « c’est notre second chantier important en paille hachée après celui du centre de loisirs d’Uzurat, il y a pas mal de projets et nous essayons d’être présents sur le territoire. Nous sommes ravis de la signature du pacte bois biosourcé qui impose au moins 10% de bois biosourcé dans les constructions. Des bâtiments vont donc bientôt se faire. »

En effet, Limoges Métropole qui a investi 10,8 M€ dans ce projet, a signé à la fin de la visite, le Pacte Bois biosourcé de même que Limoges Habitat et l’interprofession Fibois Nouvelle-Aquitaine. Les signataires se sont engagés pour que leurs constructions neuves et/ou projets de réhabilitation intègrent des solutions bois biosourcés représentant de 10 % à 70 % de la surface de plancher. « Il faut créer des synergies pour accompagner cette filière pour qu’elle se développe avec des bâtiments le plus écologique possible et matériaux locaux comme le bois » assure Guillaume Guérin, président de Limoges Métropole. Un engagement qui s’inscrit dans le projet de territoire vers une transition énergétique bas carbone.

Pour Limoges Habitat, 1er bailleur social du Limousin, « cet engagement permet de faire du bois biosourcé et du réemploi les piliers de nos réalisations neuves et en rénovation » indique Catherine Mauguein-Sicard, présidente de Limoges Habitat. Cette signature devrait doper les carnets de commandes des entreprises de la filière bois. « L’objectif est de massifier les usages du bois et d’autres matériaux biosourcés tout en renforçant la coopérative Iélo par rapport aux différents acteurs du secteur » conclut Michel Sarre, le représentant de Fibois. Une démarche en cohérence avec la stratégie nationale bas carbone 2050.

Zoom sur le bâtiment

Le futur « Espace d’innovation électronique hyperfréquence et photonique » de la Technopole d’ESTER © DR
  • Le bâtiment en forme de H est composé de 3 parties :
    • Au rez-de-chaussée, la partie centrale dessert l’aile nord avec les laboratoires et l’aile sud avec les espaces communs  (sanitaires, locaux techniques, espace de convivialité, salle de réunion).
    • Au centre, on retrouvera le hall d’accueil et le showroom.
    • A l’étage seront installés les bureaux.
  • La structure mixte bois-béton a été réalisée sur la partie sud et centrale du bâtiment jusqu’à la partie nord ce qui formera la façade du bâtiment avec des murs ossature bois, des murs porteurs intérieurs en poteau-poutre béton et des planchers mixtes bois et béton
  • Les fenêtres sont déjà posées sur la partie sud du bâtiment et en cours d’installation sur la partie centrale.
  • La partie sud est hors d’eau et hors d’air, la pose des réseaux de chauffage-ventilation-climatisation et le cloisonnement a démarré.
  • La pose du bardage en bois a commencé sur la partie sud.
  • Le bâtiment de 2 600 m² va mobiliser : 300 m³ de bois, 1 800 m² de bardage, 22 tonnes de paille hachée et 900 m² de panneaux photovoltaïques en toiture
  • Il est à énergie positive (BEPOS) : il produira 9 fois plus qu’il ne consommera soit environ 30 kWh/m²/an pour une production de 235 kWc et alimentera les bâtiments voisins.
  • Livraison : mai 2026.

 

Corinne Mérigaud
Corinne Mérigaud
Journaliste Actus Limousin
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