A la rencontre des associations locales en première ligne contre les violences faites aux femmes en Haute-Vienne

La « Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes » a été instaurée par l’ONU en 1999. Un quart de siècle plus tard, si le sujet n’est plus aussi tabou que par le passé, le constat reste accablant. Partout en France, des associations viennent en aide aux victimes de violences conjugales et font bouger les choses. Nous sommes allés à la rencontre des principales associations en Haute-Vienne.

Le 25 novembre 1960, les sœurs Mirabal, trois militantes dominicaines sont assassinées sur ordre du dictateur Rafael Trujillo. En 1999, l’Organisation des Nations Unies proclame la date du 25 novembre comme « Journée internationale pour l’élimination des violences à l’égard des femmes » et invite gouvernements et organisations à mettre en place des actions pour sensibiliser le public.

En un quart de siècle, la mobilisation internationale a certes permis d’améliorer une prise de conscience générale sur ce fléau, et a contribué à la mise en place des mesures sociales ou judiciaires de protection, mais il reste encore beaucoup trop de femmes victimes de violences conjugales pour considérer que le travail est terminé. Si ils semblaient pourtant se stabiliser, les chiffres parlent d’eux mêmes :

  • 244 301 victimes de violences conjugales en 2022 (+15% par rapport  à 2021),
  • 118 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2022 (contre 122 en 2021),
  • 80% des femmes sont victimes de violence au cours de leur vie.

-> Voir les derniers chiffres du Ministère de l’Intérieur

Si le nombre de signalements est malheureusement croissant, il est bien difficile de savoir si cela traduit une nouvelle augmentation des violences ou si c’est le signe d’une plus grande libération de la parole des victimes car fort heureusement les moyens de communication et de protection évoluent ces dernières années.

Les moyens évoluent et la parole se libère

En 2020, seulement 18% des femmes victimes de violences conjugales osaient porter plainte – par honte, par peur d’être jugée, par manque de foi en la loi et par manque financier. Avec des campagnes de communication actives sur la Haute-Vienne, des rencontres sur le terrain, la création d’associations, la mise à disposition de « téléphones grave danger » (+45%) ou les bracelets « anti-rapprochement » (1000 en activité), les femmes osent davantage parler. “De plus le voisinage ou les gens autours alertent davantage’ nous confient les gendarmes de la brigade de Bellac et Catherine Boisseau, présidente de France Victimes 87.

Des ordonnances de protection qui se multiplient (+157%) et permettent aux victimes de moins subir de représailles de leurs ex-conjoints, des paroles qui se libèrent (on note une progression de la libération de parole intrafamiliale), après parfois plusieurs décennies de violence. “Nous avons reçu une femme qui subissait depuis plus de 20 ans des coups de son mari et lorsque celui-ci a été entendu, il trouvait cela «normal»” soulignent les gendarmes. La faute à l’éducation, d’une image sociale ou l’homme doit obligatoirement avoir l’ascendant sur la femme ? Pas seulement. Les addictions (alcool, drogue) contribuent malheureusement à la violence tout comme le chômage, le manque d’argent et le décloisonnement social.

Des associations locales très actives sur le terrain

Sur le département de la Haute-Vienne, trois associations (France Victimes 87, WIFE, IELES) et l’unité de victimologie d’Esquirol travaillent, accueillent et accompagnent au quotidien les victimes de violence conjugale. et les aident à mener un travail de reconstruction souvent très long.

France Victimes 87 a pour objectif d’assurer l’information des victimes sur leurs droits et de les orienter vers les démarches judiciaires nécessaires. Un accompagnement psychologique est assuré par Catherine Boisseau, directrice et psychologue de l’association. “Nous n’avons pas encore tous les chiffres concernant les victimes de violence conjugale sur l’année 2023 ; nous recevons et accompagnons toutes les victimes de violence : conjugale, intrafamiliales et faisons de notre mieux pour leur donner le maximum de clefs pour s’en sortir”.

Des victimes sans profil types – toutes les classes sociales sont touchées et qui subissent :

  • des violences physiques
  • des violences psychologiques avec insultes, humiliation, rabaissement…
  • des violences administratives : le ou la conjointe contrôle le compte bancaire, les papiers de santé, les pièces d’identité pour isoler la victime.

France Victimes multiplient les partenariats, les collaborations avec les services, institutions, hôpitaux etc… comme par exemple le partenariat signé avec l’association WIFE, en novembre 2022. “Les choses bougent” assure Catherine Boisseau.

Catherine Boisseau, présidente de France Victimes 87

L’association W!FE, a été créée en 2021 à Saint-Léonard-de-Noblat par Valérie, qui elle-même a été victime de violences conjugales. Cette association :

  • accueille les victimes de violence (du monde rural mais aussi de la ville qui recherchent un lieu sécure) et de viols conjugaux,
  • propose des solutions d’hébergement d’urgence,
  • accompagne et fourni vêtements, vaisselle, meubles, nourriture, kit d’hygiène…
  • accompagne pour les démarches administratives afin de retrouver un logement, des papiers (partenariat avec la CAF et la sécurité sociale)

Je ne voulais pas rester dans ce statut de victime d’où l’association et j’ai pris tout ce qu’il y avait en manquements pour faire au mieux, je n’ai rien réinventé” souligne la présidente de WIFE. Une association qui rassemble une dizaine de bénévoles, et qui travaillent avec les institutions, le tribunal, les commissariats, mais aussi les pharmacies locales et les artisans et commerçants. Ainsi lorsqu’une victime passe la porte d’un commerce et dit le mot « WIFE », un accompagnement et des actions sont immédiatement mis en place pour venir en aide à la victime.

Valérie, fondatrice de W!FE en compagnie de Jean-Claude Leblois, président du département

IELES est une nouvelle association installée depuis quelques mois sur la commune de Bellac qui permet de couvrir une nouvelle zone du département concernant les actes de violence. Des initiales : Information, Écoute, Lien, Entraide et Soutien qui résonnent plus que des mots car l’association accueille tout public ayant subi des violences. LGBT, transgenre, personne en situation de handicap… l’association œuvre à informer le grand public sur la question des violences en tout genre et organise des manifestations sur la voie publique pour se faire connaitre.

Unité de victimologie d’Esquirolun lieu d’aide et de reconstruction.

Dans ce lieu hospitalier, l’équipe de professionnels dirigée par le Dr Muriel Arthus aide les victimes à briser le silence et leur offre un soutien thérapeutique solide pour gérer leurs émotions, diminuer les cauchemars, reprendre confiance et se relever de traumatismes. L’accompagnement se fait au rythme des victimes.

La vigilance, une information à transmettre dès l’adolescence

Pour essayer d’enrayer les phénomènes de violences à l’avenir, les actions d’éducation et de préventions se multiplient. Ces interventions montrent que les étudiants sont très réceptifs au problème. Des outils leur sont proposés pour les aider à détecter au plus tôt des situations « anormales », avec notamment :

  • le violentomètre
« Cliquer pour afficher en grand »

Deux outils qui se présentent sous la forme de réglettes sur lesquels sont inscrits différents types de comportements. Si les comportements du conjoint sont dans le vert, tout est normal. S’ils sont dans le rouge, il y a danger. (On peut télécharger ces outils sur internet).

Pratique

Numéro appel violence : 39 19

France Victimes 87 – 05.55.32.68.10

W!FE – 06.28.29.18.20. Accueil 7j/7j 24 h/24

IELES – 07.65.65.94.70.

Nathalie Petoux
Nathalie Petoux
Correspondante Actus Limousin en Haute-Vienne
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