Suite à la grande concertation lancée en 2023 par le Secrétariat d’État chargé de la ville, l’État et les collectivités territoriales ont élaboré un nouveau contrat de ville pour les 9 quartiers prioritaires de Limoges. Si la mobilisation collective des acteurs est louable, la très faible participation des habitants à la concertation peut laisser craindre un nouveau décalage entre la politique publique et leurs besoins réels…
Après avoir brandi le « bâton de la République » en organisant, sur l’ensemble de l’Hexagone, des opérations « place nette » pour lutter contre un trafic de drogues qui gangrène la vie des habitants des « quartiers prioritaires », l’heure est désormais à la mise en place de synergies entre l’État et les acteurs locaux pour essayer de faire évoluer le cadre d’une vie autour des « grands ensembles » marquée par une grande pauvreté, une exclusion sociale croissante et des conditions de vie très compliquées (monoparentalité, chômage, absence de diplôme…) .
En 2023, le Secrétariat d’État chargé de la ville avait lancé, à la demande du Président de la République, une grande concertation « Quartiers 2030 : vos projets dans les quartiers » pour collecter avis, besoins et idées des habitants des « quartiers prioritaire de la politique de la ville » via un questionnaire en ligne. La concertation numérique a été un échec puisque, sur 4.8 M d’habitants des 1300 quartiers de la politique de la ville, seulement 12800 personnes y ont répondu avec environ 6200 contributions complètes. Les synthèses des résultats sont disponibles sur le site de « Quartiers 2030 ».
Pour compenser cette faible participation numérique, de nombreuses rencontres locales ont été organisées et ont apparemment permis de recueillir un peu plus de de contributions. Sur la ville de Limoges, qui concentre les 9 « quartiers prioritaires » de Haute-Vienne, un peu plus de 1600 personnes auraient finalement pu être mobilisées en vue de la préparation de ce contrat « Quartiers 2030″…
Un nouveau contrat de ville « Quartiers 2030 »
Malgré le faible taux de participation à l’enquête en ligne, les pouvoirs publics ont réussi à élaborer, avec l’ensemble des acteurs de la vie des quartiers prioritaires, un nouveau contrat de ville « Quartiers 2030 », qui concerne les neufs quartiers prioritaires de la politique de la ville de Limoges : Beaubreuil, la Bastide, le Sablard, le Vigenal, les Coutures, Val de l’Aurence Nord et Sud, les Portes Ferrées et Bellevue. A noter que ces quartiers concentrent plus de 25 000 habitants soit 12% de la population de la communauté d’agglomération.
Ce nouveau contrat de ville, qui sera en vigueur pour la période 2024-2030, vise à :
- simplifier et accélérer l’action publique pour produire des résultats rapides,
- répondre aux attentes des habitants de manière qualitative,
- mobiliser les acteurs publics et privés pour garantir convergence et complémentarité avec les actions déjà engagées ¹.
Il s’organise, pour répondre aux enjeux identifiés, autour de quatre axes d’interventions :
- le vivre ensemble et la garantie des sécurités de chacun,
- la transition solidaire et écologique des quartiers,
- l’accessibilité des habitants à tous les services,
- le développement de l’emploi et de la formation pour tous et tout au long de la vie.
A noter, qu’il est aussi clairement précisé que « Ces axes eux-mêmes prennent en compte des thématiques transversales : la connaissance et le respect des valeurs de la République et du principe de laïcité, la lutte contre les discriminations, l’égalité femmes/hommes, les relations et la solidarité intergénérationnelles. »
Ce contrat de ville « Quartiers 2030 » a été officialisé le 12 avril par la signature conjointe d’une trentaine de collectivités et organisations du territoire dont : l’État, la Région Nouvelle-Aquitaine, le Département de la Haute-Vienne, Limoges Métropole, la Ville de Limoges, l’ARS, la Mission Locale, la CCI, la Chambre des Métiers, la CPAM, l’URSSAF, l’Université de Limoges, le Rectorat, ou encore des entreprises comme Catalent, Legrand Enedis, Orange etc…
Malgré cette belle mobilisation collective, difficile de savoir si ce contrat de ville répondra à ses objectifs. Année après année, les politiques publiques qui promettent de trouver enfin des solutions aux problèmes récurrents des « quartiers prioritaires », se succèdent sans pour autant porter les fruits attendus. Et cette récente tentative de sonder les habitants, via une plateforme numérique est clairement, au vue de la très faible participation (0.26% des habitants des « QPV »), un échec.
Il y’a malheureusement bien des chances qu’avec une base aussi fragile, ce nouveau contrat ne parvienne pas non plus à changer la vie des habitants des « quartiers prioritaires » pour qui l’emploi et l’éducation sont toujours bien plus au cœur des préoccupations quotidiennes, et c’est compréhensible, que la transition écologique. Difficile dans ces conditions de se projeter jusqu’en 2030, quand pour la majorité, et comme l’avait si bien souligné le groupe IAM en 1997, «Demain c’est loin»…
¹ A noter que ce contrat de ville devrait coordonner entre eux les dispositifs spécifiques déjà mis en œuvre comme le programme de renouvellement urbain « Quartiers en Mieux », la cité éducative, ou encore la cité de l’emploi…