7.8 C
Région Limousin
samedi 27 avril 2024

Des Gaulois à aujourd’hui, découvrez l’incroyable histoire de l’or en Limousin

De la formation d’une chaine de montagnes géantes aux principales mines d’or de la Gaule, de l’orpaillage du Moyen-Age à l’ère industrielle moderne, suivre le filon de l’or en Limousin c’est traverser le temps et l’histoire à la découverte d’un passé doré.

C’est une histoire presque incroyable que celle de l’or limousin et comme souvent avec ce genre d’histoire, elle commence il y’a fort fort longtemps…

De l’océan Massif-Central à une chaine de montagne presque entièrement « rabotée »

Pour bien commencer, il nous faut remonter il y’a 450 millions d’années, à une époque où la Terre ne ressemblait pas beaucoup à ce qu’elle est aujourd’hui et où le Massif Central était un océan coincé entre 2 giga-continents : Laurentia-Baltica et Gondwana. Une centaine de millions d’années de tectoniques des plaques plus tard, les 2 giga-continents finirent par se rencontrer avec fracas donnant naissance à une immense chaine de montagne, du même acabit que l’Himalaya.

Mais le vent, l’eau et le temps sont capables de venir à bout de tout, même des plus grandes montagnes. Le sous-sol limousin d’aujourd’hui est donc constitué des zones profondes de ces montagnes, presque intégralement « rabotées » par l’érosion. Les roches qui affleurent actuellement en Limousin se sont formées très profondément dans la croute terrestre, entre 20 km et 60 km sous la surface où les températures sont de 300°C à 700°C, avant d’être propulsées vers le haut par la tectonique et enfin mises à jour par des centaines de millions d’années d’érosion.

C’est dans ces roches profondes que se trouvent les filons de quartz aurifères qui affleurent aujourd’hui en Limousin et qui affleuraient déjà au temps où la campagne limousine était peuplée… de gaulois.

70 tonnes d’or limousin et les plus importantes mines d’or de la Gaule

Les blocs de quartz affleuraient donc dans la campagne limousine et les paillettes d’or à l’intérieur étaient visibles à l’oeil nu. L’exploitation de l’or par les gaulois commença donc au Vème siècle av. JC autour des principaux sites aurifères : les environs du Chalard, sûrement le site le plus important de la Gaule, et les monts d’Ambazac.

Les gaulois exploitaient surtout l’or en surface dans les « aurières », des mines à l’air libre là où affleurent les gisements de quartz aurifère. On dénombre encore au moins 2000 aurières en Haute-Vienne. Les gaulois creusaient aussi des mines souterraines pouvant atteindre 30 mètres de profondeur grâce à des techniques d’étayage très élaborées. Ils mettaient ensuite le feu dans les galeries de roche avant de pulvériser de l’eau sur le quartz chaud pour le faire éclater et atteindre plus facilement les blocs d’or à l’aide de pointerolle.

L’or gaulois servait à frapper des monnaies, fabriquer des bijoux et orner les armures, ici le casque d’Agris exposé au Musée d’Angoulème – © Xuan Che via Flickr

Après avoir conquis l’actuel Limousin, les romains exploiteront eux aussi les mines d’or autour du Chalard, avec des techniques encore plus élaborées (système de pompes, vis sans fin…) mais cesseront finalement l’exploitation pour se concentrer sur des gisements plus riches en Espagne et en Roumanie. En 400 ans, les archéologues estiment que les Gaulois auraient extrait quelques 70 tonnes d’or du sol limousin, avant que l’exploitation aurifère limousine ne soit oubliée. Pour toujours ?

L’orpaillage du Moyen-Âge, une carte aux trésors et une petite ruée vers l’or

Quelques centaines d’années plus tard, on cherche de nouveau de l’or en Limousin mais c’est cette fois dans les rivières qu’on le trouve. Au Moyen-Âge on pratique l’orpaillage dans les cours d’eau à proximité des anciens filons et notamment dans l’Aurence. Cette pratique aurait perduré jusqu’au XIIIème siècle avant que l’or limousin ne retombe à nouveau dans l’oubli.

Mais en 1866, l’ingénieur des Mines François-Ernest Mallard réalise une carte géologique et minière de la Haute-Vienne, véritable carte aux trésors du sous-sol, qui remet en lumière 3 secteurs aurifères en Creuse et en Haute-Vienne : à Evaux-les-Bains, à Ambazac et à proximité de Saint-Yrieix la Perche.

« La carte aux trésors » de la Haute-Vienne par l’ingénieur Mallard, publié en 1869 – © Bibliothèque de Mines Paris Tech

On assiste alors à une petite ruée vers l’or limousin et une quarantaine de concessions, essentiellement sur les anciens sites aurifères gaulois, sont accordées au début du XXème siècle. Les résultats ne seront pas toujours à la hauteur des espérances et la guerre de 14-18 interrompra tous les projets. Seul une petite partie des exploitations reprendront entre les années 1920-1950 et quelques dizaines de tonnes d’or supplémentaires seront alors extraites du sol.

 L’ère de l’exploitation industrielle n’est peut-être pas terminée

Dans les années 80, l’exploitation reprend aux alentours de Saint-Yrieix en « mode industriel » sous l’impulsion de grosses sociétés minières. Pendant 20 ans, des millions de tonnes de roches seront extraits puis traités pour récupérer l’or restant dans le minerai. Mais plus on creuse profondément, plus le coût d’extraction augmente et les mines d’or limousines deviendront de moins en moins rentables et cesseront définitivement leur activité en 2002 après avoir livré plus de 28 tonnes d’or.

Le prix de l’or augmentant régulièrement, surtout après la crise financière de 2009, l’or limousin attira à nouveau l’attention, celle d’une grosse société minière australienne. En 2017, le Ministère des Mines lui délivra un permis de recherche exclusif de 5 ans sur une zone de 300 km² autour de Saint-Yrieix-la-Perche, au grand désarroi des locaux inquiets de voir reprendre l’activité minière et la pollution qui en résulte .

Le permis de la société australienne vient d’expirer sans qu’elle n’est réalisé le moindre forage et le projet de reprise de l’exploitation semble donc abandonné. Mais l’histoire ne s’arrête pas là puisque l’État examine actuellement 3 autres demandes. Et cet été, un hélicoptère du Bureau des Recherches Géologiques et Minières équipée d’une antenne géante survole le territoire pour réaliser une nouvelle cartographie du sous-sol avec des techniques de pointe. La fièvre de l’or est toujours d’actualité et le sous-sol limousin n’a peut-être pas encore livré tous ses secrets.

A la Maison de l’or au Chalard, revivez 2500 ans d’histoire et devenez orpailleur·euse !

Au Chalard, centre du principal site aurifère limousin, une poignée de passionné·e·s vous fait revivre 2500 ans d’histoire grâce au Musée de l’Or qui abrite une collection d’objets de l’époque gauloise, retrouvés sur les sites alentours, ainsi qu’une partie consacrée à la géologie et à l’exploitation industrielle des années 1980-2000.

Vous pourrez vous initier à l’orpaillage dans une rivière aurifère avoisinante à l’occasion de journées spéciales, « les Journées en Or », qui combinent initiation à l’orpaillage le matin et visite guidée sur les anciens sites miniers l’après-midi. Attention, ces journées n’ont lieu que quelques jours pendant l’été  : les 20, 23 et 27 Juillet 2022 – 6, 10 et 20 Août 2022.

Il faut compter 16€ pour les adultes et 14€ pour les enfants. Informations et réservation sur le site de la Maison de l’Or à Le Chalard (87500)

 

Sources :

Perrier Antoine. L’or en Limousin. In: Revue géographique des Pyrénées et du Sud-Ouest, tome 12, fascicule 2, 1941. pp. 230-235.

Pierre Thomas, Patrice Bruneton, 17/10/2018. Les mines d’or du district de Saint-Yrieix-la-Perche et la Maison de l’Or en Limousin au Chalard (Haute-Vienne), Planet Terre – ISSN 2552-9250

Brice Milbergue
Brice Milbergue
Rédacteur en chef d'Actus Limousin

A la une

Plus d'articles